Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/341

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nique : mais même après la victoire il défendit qu’on le nommât Céſar. Valens & ſon armée eurent un favorable augure pour la guerre qu’ils alloient faire : car le jour même du départ, un Aigle planant doucement à la tête des Bataillons, ſembla leur ſervir de guide, & durant un long eſpace les ſoldats pouſſerent tant de cris de joie & l’Aigle s’en effraya ſi peu, qu’on ne douta pas ſur ces préſages d’un grand & heureux succès.

L’armée vint à Treves en toute ſécurité comme chez des alliés. Mais, quoiqu’elle reçût toutes ſortes de bons traitemens à Divolure, Ville de la Province de Metz, une terreur panique fit prendre ſans ſujet les armes aux ſoldats pour la détruire. Ce n’étoit point l’ardeur du pillage qui les animoit, mais une fureur, une rage d’autant plus difficile à calmer qu’on en ignoroit la cauſe. Enfin après bien des prieres, & le meurtre de quatre mille hommes, le Général ſauva le reſte de la Ville. Cela répandit une telle terreur dans les Gaules, que de toutes les Provinces où paſſoit l’armée on voyoit accourir le peuple & les Magiſtrats ſupplians, les chemins ſe couvrir de femmes, d’enfans, de tous les objets les plus propres à fléchir un ennemi même, & qui ſans avoir de guerre imploroient la paix.

A Toul, Valens apprit la mort de Galba & l’élection d’Othon. Cette nouvelle, ſans effrayer ni réjouir les troupes ne changea rien à leurs deſſeins, mais elle détermina les Gaulois, qui, haïſſant également Othon & Vitellius, craignoient de plus celui-ci. On vint enſuite à Langres, Province voiſine, & du parti de l’armée ; elle y fut bien reçue & s’y comporta honnê-