Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t8.djvu/498

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remplies de traits & de lettres figurées, ne contiennent que deux ou trois mots, & qui renferment très-peu de sens en un grand espace.

L’impossibilité d’inventer des chants agréables obligeroit les Compositeurs à tourner tous leurs soins du cote de l’harmonie, & faute de beautés réelles, ils y introduiroient des beautés de convention, qui n’auroient presque d’autre mérite que la difficulté vaincue : au lieu d’une bonne Musique, ils imagineroient une Musique savante ; pour suppléer au chant, ils multiplieroient les accompagnemens ; il leur en couteroit moins de placer beaucoup de mauvaises parties les unes au-dessus des autres, que d’en faire une qui fut bonne. Pour ôter l’insipidité, ils augmenteroient la confusion ; ils croiroient faire de la Musique, & ils ne seroient que du bruit.

Un autre effet qui resulteroit du défaut de mélodie, seroit que les Musiciens n’en ayant qu’une fausse idée, trouveroient par-tout une mélodie à leur maniere : n’ayant pas de véritable chant, les parties de chant ne leur couteroient rien a multiplier, parce qu’ils donneroient hardiment ce nom a ce qui n’en seroit pas ; même jusqu’à la Basse-continue, a l’unisson de laquelle ils seroient sans façon réciter les Basses-tailles, sauf a couvrir le tout d’une sorte d’accompagnement, dont la prétendue mélodie n’auroit aucun rapport à celle de la partie vocale. Par-tout ou ils verroient des notes ils trouveroient du chant, attendu qu’en effet leur chant ne seroit que des notes. Voces, praetereàque nihil.

Passions maintenant à la mesure, dans le sentiment de laquelle