Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t9.djvu/656

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correspondent. De sorte qu’on entend à la fois deux Sons, comme on voir a la fois deux couleurs, parce qu’étant produits par différentes parties ils affectent l’organe en différens points.

Ce systême est ingénieux, mais l’imagination se prête avec peine à l’infinité de particules d’air différentes en grandeur & en mobilité, qui devroient être répandues dans chaque point de l’espace pour être toujours prêtes, au besoin, à rendre en tout lieu l’infinité de tous les Sons possibles. Quand elles sont une fois arrivées au timpan de l’oreille, on conçoit encore moins comment, en le frappant, plusieurs ensemble, elles peuvent y produire un ébranlement capable d’envoyer au cerveau la sensation de chacune en particulier. Il semble qu’on a éloigné la difficulté plutôt que de la resoudre : on allegue en vain l’exemple de la lumiere dont les rayons se croisent dans un point sans confondre les objets : car,outre qu’une difficulté n’en résout pas une autre :, la parité n’est pas exacte, puisque l’objet est vu sans exciter dans l’air un mouvement semblable à celui qu’y doit exciter le corps sonore pour être ouï. Mengoli sembloit vouloir prévenir cette objection, en disant que les masses d’air chargées, pour ainsi dire, de différens Sons, ne frappent le timpan que successivement, alternativement, & chacune à son tour ; sans trop songer à quoi il occuperoit celles qui sont obligées d’attendre que les premieres aient achevé leur office, ou sans expliquer comment l’oreille, frappée de tant de coups successifs, peut distinguer ceux qui appartiennent à chaque Son.