Page:Rousseau - Du Contrat social éd. Beaulavon 1903.djvu/97

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entre l’école des économistes physiocrates et Rousseau, à cause du rôle de la nature dans les théories des uns et des autres ; mais le rapprochement serait superficiel, presque uniquement verbal, et, je crois, sans fondement historique : Rousseau a bien célébré le retour à la nature, l’agriculture et la vie champêtre, mais il suffît de lire son article Économie politique ( 1 ), pour voir combien profondément il diffère des hommes qui posaient, à cette époque même, les fondemeuts de cette science. — M. André Lichtenberger, qui a étudié de très près la naissance des théories socialistes au xvin e siècle, reconnaît surtout l’influence de Rousseau dans les œuvres de trois auteurs, inégalement obscurs, mais tous les trois secondaires, Raynal, Mercier et Restif de la Bretonne (-). On pourrait être tenté d’y ajouter Mably ( 3 ) et Condorcet ( 4 ) ; mais, en étudiant de

richesse publique et privée, aurait eu peu d’attraits pour Rousseau, dont on se rappelle le Projet de constitution pour la Corse: « Il faut que tout le monde vive et que personne ne s’enrichisse » (p. 91) ... « Je veux que la propriété de l’État soit aussi grande, aussi forte et celle des citoyens aussi faible, aussi petite qu’il est possible .. » (p. 100) (Œuvres et corr. inéd. publ. par M. Streckeisen-Moultou).

(*) C’est surtout une première esquisse du Contrat social et les questions économiques y sont étudiées presque uniquement, du point de vue de l’Etat, très sommairement et superficiellement d’ailleurs.

( 2 ) A. Lichtenberger, le Socialisme au XVIIIe siècle, ch. vi.

( 3 ) M. Paul Janet croit que « Mably doit être séparé de J.-J. Rousseau et rattaché à une autre origine » (celle de Platon). Hist. de la sc. pol., t. II, p. 651.

( 4 ) J’ai signalé plus haut l’influence du Contrat social sur le projet de constitution, dit girondin, préparé par Condorcet en 1793. Mais les idées les plus importantes et les plus caractéristiques de Condorcet, sa conception de l’application des mathématiques aux problèmes politiques, sa confiance dans la science et dans le progrés, ses projets pédagogiques, etc., me paraissent en opposition complète avec l’esprit du système de Rousseau. Condorcet a surtout subi l’influence de Turgot, et aussi de Voltaire. — Tout au plus pourrait-on signaler, au IIIe livre du