Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/220

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

{ .

 LIVRE III. — CHAP. XII. 163

ne saurait agir que quand le peuple est assemble. Le peuple l assemblé, dira-t-on, quelle chimére! C’est une chimére aujourd’hui ; mais ce n’en était pas une ily a deux mille ans. Les hommes ont-ils changé de nature? i Les bornes du possible, dans les choses morales, sont moins étroites que nous ne pensons : ce sont nos faiblesses, r nos vices, nos préjugés, qui les rétrécissent. Les Etmes basses l ne croient point aux grands hommes : de vils esclaves s r sourient d’un air moqueur a ce mot de liberté.

  • Par ce qui s’est fait, considérons ce qui se peut faire; je

ne parlerai pas des anciennes républiques de la Gréce ; mais la république romaine était, ce me semble, un grand Etat, { et la ville de Rome une grande ville. Le dernier cens donna dans Rome quatré cent mille citoyens portant armes, et le 1 dernier dénombrement de l’empire plus de quatre millions I de citoyens, sans compter les sujets, les étrangers, les p femmes, les enfants, les esclaves. Quelle difficulté n’imaginerait-on pas d’assembler fré- quemment le peuple immense de cette capitale et de ses environs! Cependant il se passait peu de semaines que le l peuple romain ne fut assemblé, et méme plusieurs fois. Non seulement il exercait les droits de la souveraineté, mais une partie de ceux du gouvernement. Il traitait cer- taines affaires, il jugeait certaines causes, et tout ce peuple = était sur la place publique presque aussi souvent magistrat que citoyen. En remontant aux premiers temps des nations, on trou- _ verait que la plupart des anciens gouvernements, méme l monarchiques, tels que ceux des Macédoniens et des Francs, Q l sance... La loi, pour se faire obéir, n’a d’autre puissance que celle de l’habi- I tude, et Phabitude ne se forme qu’avec le temps et les années, de telle sorte que changer légerement les lois existantes pour de nouvelles, c’est aftaiblir I d’autant la force meme de la loi.' Bossum, Politiquc tirée de l’Ecriture sainte, liv. I, art. 6. VII1° Propo- sition. — En général, les lois ue sont pas lois si elles ne sont pas invio- lables... Ou perd la vénératiou aux lois quand on les voit souvent changer. l