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La Monongahéla

Car — est-il besoin de le dire ? — Don Gusman, en présence de la riche beauté de la jeune fille, n’avait pu rester insensible à ses charmes et s’était modestement placé sur la liste des prétendants. Est-il nécessaire d’ajouter que le commandant se serait fait un crime de repousser ces recherches de Don Gusman pour sa fille, ne trouvant pas, dans sa partialité pour lui, un parti plus noble et plus brillant.

Quant à Dona Maria, en vraie espagnole, le luxe déployé par l’alcade, et ses grandes richesses, avaient bien le don d’éblouir son esprit et de flatter son amour-propre ; mais ces grands avantages touchaient-ils son cœur ? C’est ce que nous verrons dans la suite de ce récit.

Dans tous les cas, soit coquetterie, soit tout autre sentiment, Daniel crut remarquer, dès la première semaine de son séjour chez Don Pedro, que la jeune fille ne paraissait pas insensible aux attentions, empressées de Don Gusman.

Chose étrange à cette époque de galanterie, étant donné sa nature et son caractère sympathique, Daniel avait eu cependant une jeunesse ascétique et était ignorant de cette grande chose qu’on appelle : l’amour ! Car il nous est impossible de donner ce nom à trois ou quatre innocentes intrigues dont il avait été le héros, et qui n’avaient pas même laissé dans son esprit l’empreinte d’un souvenir.

Dès le premier jour, en voyant Doña Maria, Daniel