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La Monongahéla

— Cet avantage a même engagé bon nombre de vos compatriotes à prendre du service parmi nous, señor, dit un vieil officier qui se trouvait placé en face de Daniel.

— D’où vous concluez ? fit celui-ci.

— D’où je conclus que nous serions tous heureux si monseigneur vous engageait à rester parmi nous.

— Je n’ai pas manqué de faire mes offres de service au señor de St. Denis, répondit le vice-roi ; mais il a refusé.

— Oui, monseigneur, oui, señores, reprit Daniel en promenant un regard autour de lui, j’ai refusé parce que j’ai juré fidélité à mon roi et que je tiendrai ce serment. Je n’ai pas mission de juger l’action de mes compatriotes qui servent parmi vous, mais je comprends autrement le devoir. Jamais — dussé-je rester pauvre et ignoré toute ma vie — je ne m’exposerai à déchirer de mes propres mains le sein de ma patrie.

— Mais, señor, fit en souriant le vice-roi, vous êtes déjà à demi espagnol[1] puisque, à votre retour au Presidio del Norte, on assure que vous devez épouser certaine belle andalouse de ma connaissance, fille d’un certain personnage officiel que je connais également. Si vous acceptez l’offre d’une compagnie de cavalerie au service du roi d’Espagne, tous les

  1. Ces paroles sont historiques.