Page:Rousseau - Philosophie, 1823.djvu/112

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A-t-il préféré, au contraire, la science à la vertu ? Pourquoi donc nous prêcher avec tant d’éloquence celle-ci au préjudice de celle-là ? Qu’il commence par concilier des contradictions si singulières, avant que de combattre les notions communes ; avant que d’attaquer les autres, qu’il s’accorde avec lui-même.

N’aurait-il prétendu qu’exercer son esprit et faire briller son imagination ? Ne lui envions pas le frivole avantage d’y avoir réussi. Mais que conclure en ce cas de son discours ? Ce que l’on conclut après la lecture d’un roman ingénieux ; en vain un auteur prête à des fables les couleurs de la vérité, on voit fort bien qu’il ne croit pas ce qu’il feint de vouloir persuader.

Pour moi, qui ne me flatte, ni d’avoir assez de capacité pour en appréhender quelque chose au préjudice de mes mœurs, ni d’avoir assez de vertu pour pouvoir en faire beaucoup d’honneur à mon ignorance, en m’élevant contre une opinion si peu soutenable, je n’ai d’autre intérêt que de soutenir celui de la vérité.

L’auteur trouvera en moi un adversaire impartial. Je cherche même à me faire un mérite auprès de lui en l’attaquant ; tous mes efforts, dans ce combat, n’ayant d’autre but que de réconcilier son esprit avec son cœur, et de procurer la satisfaction de voir réunies dans son âme les sciences que j’admire avec les vertus qu’il aime.