Page:Rousseau - Philosophie, 1823.djvu/117

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font connaître le mal, elles nous en font connaître aussi le remède. Un botaniste habile sait démêler les plantes salutaires d’avec les herbes venimeuses ; tandis que le vulgaire, qui ignore également la vertu des unes et le poison des autres, les foule aux pieds sans distinction, ou les cueille sans choix. Un homme éclairé par les sciences distingue, dans le grand nombre d’objets qui s’offrent à ses connaissances, ceux qui méritent son aversion ou ses recherches ; il trouve, dans la difformité du vice et dans le trouble qui le suit, dans les charmes de la vertu et dans la paix qui l’accompagne, de quoi fixer son estime et son goût pour l’une, son horreur et ses mépris pour l’autre ; il est sage par choix, il est solidement vertueux.

Mais, dit-on, il y a des pays où, sans science, sans étude, sans connaître en détail les principes de la morale, on la pratique mieux que dans d’autres où elle est plus connue, plus louée, plus hautement enseignée. Sans examiner ici à la rigueur ces parallèles qu’on fait si souvent de nos mœurs avec celles des anciens ou des étrangers, parallèles odieux, où il entre moins de zèle et d’équité que d’envie contre ses compatriotes, et d’humeur contre ses contemporains, n’est-ce point au climat, au tempérament, au manque d’occasion, au défaut d’objet, à l’économie du gouvernement, aux coutumes, aux lois, à toute autre cause qu’aux sciences, qu’on doit attribuer cette différence qu’on remarque quelquefois dans les mœurs en différents pays, et en différents temps ? Rappeler sans cesse cette simplicité primi-