Page:Roussel - Chiquenaude, 1900.djvu/22

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son chemin sans même se retourner, et la pauvre enfant, brisée par trop d’émotions, chancelait sur ses genoux et tombait évanouie.

Au milieu du silence, Chiquenaude regardait le cadavre de Méphisto. Au bout de quelques instants elle le prenait sous les bras et l’enlevait assez facilement. Le remplaçant de Cadran était cependant grand et bien bâti. Malgré tout, la sorcière parvenait à l’asseoir sur une chaise et laissait le haut du corps s’appuyer sur la toilette de Foire.

Le rayon de lune éclairait ainsi le mort tout entier.

Ivre de joie, la vieille fée examinait la blessure fatale. L’épée, en traversant toute la cuisse, avait laissé deux trous dans le drap.

Mettant l’ongle dans un de ces trous, Chiquenaude tirait doucement. Et sans aucun effort elle arrachait tout un large carré d’étoffe. C’était un de ces morceaux neufs que le diable rajoutait parfois quand l’usure l’y obligeait. L’épée, en le rencontrant, l’avait traversé aussi facilement qu’une partie plus fragile.

Triomphante, la sorcière montrait le carré cramoisi en élevant la main. Et l’on pouvait juger