Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/164

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lapidé par une foule nombreuse, Roméo, à bout de forces, tomba mort sous les yeux de Juliette égarée, qui, toujours ornée du collier déjà moins rouge, devint à son tour la proie du breuvage hallucinant.

Une lumière brilla soudain à gauche, derrière la toile de fond, éclairant une apparition visible à travers un fin grillage peint, qui jusqu’alors avait semblé aussi opaque et homogène que le mur fragile dont il faisait partie.

Juliette se tourna vers le flot de clarté en s’écriant :

— Mon père !…

Capulet, représenté par Soreau, était debout, en longue robe dorée soyeuse et flottante ; son bras se tendait vers Juliette dans un geste de haine et de reproche, se rapportant clairement au mariage coupable célébré en secret.

Tout à coup l’obscurité régna de nouveau, et la vision disparut derrière le mur redevenu normal.

Juliette, agenouillée dans une attitude suppliante, se releva, secouée par ses sanglots, pour rester quelques instants la face ensevelie dans ses deux mains.

Une illumination nouvelle lui fit redresser la tête et l’attira vers la droite devant une évocation du Christ, qui, monté sur l’âne légendaire, se trouvait à peine voilé par un second grillage