Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/311

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mal. Eh ! mon Dieu, toute la vie ne se passe-t-elle pas à combattre et repousser des choses qui nous plairaient ?

Serait-il possible de faire un théâtre vraiment moral ? En théorie, je réponds oui ; mais dans la pratique j’en doute. On ne peut pas condamner le théâtre en bloc comme essentiellement mauvais, et je ne vois pas pourquoi l’on ne pourrait pas sur la scène prêcher le vrai, faire l’éloge de la vertu et flétrir le vice. C’est un genre de littérature, d’éloquence, de propagande, qui devrait pouvoir être mis au service de la vérité.

Mais dans la réalité il n’en est pas ainsi, et l’expérience des choses du théâtre semble démontrer que le rêve de ceux qui croient à la réforme des mœurs par le théâtre est irréalisable. Un théâtre sincèrement moral ne ferait pas ses frais.

Quoi qu’il en soit de cette question, qui a été souvent agitée, nous allons considérer le théâtre tel qu’il est à Paris, et non pas tel qu’il pourrait être.

Victor Hugo, qui a tant adulé Ta grande ville, et qui a réussi à lui plaire par tant d’élogieuses métaphores, l’a appelé un jour la Citê sainte. Je suis porté à croire que cette appellation a fait sourire Paris, et qu’il a été plus reconnaissant au poète de l’avoir nommé Sparte et la Ville-Lumière.

Sans doute, la sainteté existe à Paris, et vous en serez convaincus et édifiés, lecteurs, si vous fréquentez les églises, les congrégations religieuses, certains cercles catholiques, et plusieurs salons de la meilleure