Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/100

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de la quantité de ruches qui leur seroient nécessaires pour faire, des abeilles qu’ils élèvent, un profit certain ; ils seroient donc forcés de consacrer pendant cinq ou six ans, tout le produit de leurs ruches, afin de s’en procurer un nombre suffisant pour loger leurs abeilles : or, il est difficile de les persuader de faire ce sacrifice, quelques grands que soient les avantages qu’ils en peuvent retirer ; ils calculent moins les profits qu’on leur fait entrevoir, que la dépense qu’il faut faire pour en jouir. Les personnes riches ou aisées sont donc les seules qui puissent se procurer ces ruches.

2o. Si on a deux ou trois douzaines de ces ruches, il faut des emplacemens spacieux, de vastes enclos, de grands jardins pour les placer ; d’ailleurs, comment leur procurer à toutes une exposition avantageuse ? Dans la maison, il faut des greniers assez grands, où l’on puisse déposer les ruches, les surtouts qui ne sont pas employés, ou que l’on a mis en réserve pour recevoir les essaims qu’on attend : tous les habitans de la campagne n’ont certainement pas ces aisances : sous un rucher couvert simplement en paille, & adossé contre leur maison, ils placeront facilement vingt-cinq à trente ruches, qui auront toutes une bonne exposition ; s’il falloit, au contraire, les distribuer dans leur jardin, & autour de leur maison, ils en auroient trop de la moitié.

3o. Lorsqu’il fait froid, ou qu’il pleut, le surtout est utile ; mais dans les grandes chaleurs, les abeilles, calfeutrées de la sorte, peuvent étouffer, ainsi que le couvain, la cire se fondre, le miel couler. Comment procurer dans la ruche une circulation d’air qui se renouvelle & rafraîchit les abeilles lorsqu’il fait très-chaud ? Celui qu’on leur donneroit par la coulisse qui est au-dessus de la table, échauffé par la réverbération du sol, contribueroit à rendre leur habitation insoutenable.

4o. L’ouverture qui sert de porte aux abeilles pour entrer dans leur ruche, doit être exactement au niveau de la table ; elle leur devient incommode, si elle est élevée, pour y monter avec leur charge, quand elles reviennent de la provision : le cadran adapté à ces sortes de ruches, a l’inconvénient d’être toujours au-dessus de la table. La garde du domicile devient plus difficile aux abeilles qui se promènent intérieurement devant leur porte ; dans un moment d’attaque, elles peuvent être surprises par l’ennemi qui entre sans être apperçu, à moins que les abeilles ne soient aux arcades comme à une fenêtre. S’il est tourné du côté plein, l’air ne se renouvelle plus dans la ruche, à moins que la coulisse qui est sous la table ne soit percée ; alors ce sont des portes qu’on ouvre aux papillons qui engendrent les fausses teignes & à quantité d’autres insectes.

5o. Quelle peine, quel embarras pour enlever le surtout qui tient à la table par des crampons, où entrent des goupilles pour le fixer, lorsqu’il est nécessaire de visiter les abeilles, de tailler les ruches, &c. ! le bois de la table peut être renflé par l’humidité ; comment l’enlever alors sans secousses ?

Les ruches de M. de Massac,