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tures de la ruche ou sur le devant, sont parties avec la jeune reine, lorsqu’elle a pris son essor, & celles qui étoient dans l’intérieur, occupées à leurs ouvrages, n’ont point été entraînées par le tumulte qui s’est fait au bas de la ruche au moment du départ : voilà d’où provient ce mélange de jeunes & vieilles abeilles dans un essaim & dans la ruche d’où il est sorti.

Tous les essaims ne sont pas composés de quinze ou vingt mille abeilles ; il y en a de moins considérables : quelques-uns même ne sont que de trois ou quatre mille ; ce sont ordinairement les derniers qui ne sont pas les meilleurs par cette raison, outre qu’ils viennent trop tard pour qu’ils aient le tems nécessaire pour travailler & se précautionner contre la mauvaise saison, & que la reine puisse aussi faire une ponte assez considérable pour augmenter le nombre de ses sujets. Les premiers sont toujours les meilleurs, parce qu’ils sont composés ordinairement d’un grand nombre d’abeilles ; quand même ils seroient peu nombreux, on a lieu d’espérer que la ponte de la jeune reine fournira assez de citoyennes pour augmenter la population de son état naissant.

On juge de la bonté d’un essaim par le nombre d’abeilles dont il est composé : comme il seroit difficile de les compter, on peut les peser avec la ruche, & déduire le poids de celle-ci qu’on aura pesée auparavant, & le surplus sera le poids de l’essaim. Les meilleurs sont ceux de cinq ou six livres ; ceux de huit sont des phénomènes très-rares, & il n’est point à desirer qu’ils le deviennent moins, parce qu’un poids aussi considérable est toujours au préjudice de la mère-ruche, qui s’étant trop dégarnie de monde, est en danger de périr l’hiver suivant. Voyez la Sect. 5e du Chap. 2e de la Ire Part. p. 18, pour savoir à peu-près le nombre des abeilles qui composent un essaim.


Section V.

Comment arrêter un Essaim dans sa course.


Il ne suffit pas de suivre un essaim qui est en l’air, on doit songer à l’arrêter dans sa fuite, & à l’engager à se fixer. Si les abeilles en sortant de la ruche se sont d’abord fort élevées, il est à craindre qu’elles ne dirigent leur vol plus loin qu’on ne voudroit, à moins qu’on y forme obstacle tout de suite ; souvent elles vont si loin qu’il est impossible de les suivre, & on perd alors l’essaim. Pour l’arrêter dans sa fuite, autrefois on avoit recours à un expédient assez singulier : on faisoit avec des chaudrons ou des pelles à feu, sur lesquelles on frappoit, une espèce de tintamarre pour imiter le bruit du tonnerre qu’elles craignent sans doute, puisqu’elles rentrent dans leur domicile dès qu’il tonne. Les abeilles, qui n’étoient point les dupes de ce tonnerre figuré, suivoient leur détermination, si elles avoient dirigé leur vol fort haut, & ne venoient point se rabattre comme on s’y attendoit. Dans les campagnes, les bonnes gens font encore usage de ce moyen ridicule & inutile, plus propre à éloigner les abeilles qu’à les porter à se fixer où l’on desire.

Un moyen qu’on peut employer