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jouir du fruit de leurs travaux ; & des ouvrages de leur industrie & de leur activité. Quand un essaim commence seulement à s’établir, le plus petit vol est capable de le dégoûter, & de lui faire abandonner son habitation ; d’ailleurs, on enlèveroit certainement une partie du couvain qui est alors répandu dans tout le domicile, & qui fait la plus chère espérance de cette république naissante. Après que le tems de la récolte est passé, c’est-à-dire, vers le milieu de Juillet à peu-près, on baisse absolument les ruches, & on les scelle sur leur support avec du pourjet ; & si les gâteaux, par extraordinaire, passoient les bords de la ruche, on les couperoit au moins d’un pouce au-dessus de la table. On n’est jamais dans ce cas avec les ruches de la nouvelle construction.


Section IX.

Des moyens d’obliger une Ruche de donner son Essaim.


Quoiqu’il y ait différens moyens d’obliger une ruche d’essaimer, il est certain que tant qu’elle ne donne point d’essaim, c’est une preuve, ou qu’elle n’est pas assez peuplée pour envoyer une colonie hors de ses états, sans s’affoiblir, ou qu’elle n’a point de reine pour la conduire & la gouverner, ou qu’elle se trouve bien dans le domicile qu’elle habite. La ponte des abeilles-ouvrières qu’a faite la mère de la ruche, peut avoir bien réussi, tandis que celle des femelles aura manqué ; & dans cette circonstance, il n’y a point d’essaim à espérer, puisqu’il n’y a point de chef pour le conduire. La foiblesse de la population de la ruche, ou le défaut de reine, seront toujours deux obstacles à la sortie des essaims, indépendans de nous.

M. du Carne, pour obliger une ruche à essaimer, lui donne deux, ou même trois hausses par-dessous : une partie des abeilles, dégoûtée de ce qu’on lui offre trop de travail à faire en même tems, part si elle a une reine pour la conduire : d’autres fois, au contraire, les ouvrières se mettent à l’ouvrage avec ardeur, & ne songent point à s’expatrier ; ce qu’il assure cependant être fort rare. Il oblige encore une ruche à donner son essaim, en l’élevant de deux ou trois pouces au-dessus de sa table, & la laissant trois jours dans cette situation, après lesquels il la baisse subitement par un tems très-chaud : en procurant de cette manière une chaleur subite & excessive aux abeilles, elles trouvent leur demeure incommode, & une partie se décide à l’abandonner.

On ne disconvient point que ces moyens ne soient capables d’obliger quelquefois une ruche bien fournie d’abeilles de donner son essaim : cependant il sera toujours généralement vrai, que si elles se trouvent bien dans leur habitation, elles ne la quitteront pas ; & quand même elle seroit incommode, une partie ne se décidera point à s’expatrier, s’il n’y a point de reine pour conduire la colonie. Le meilleur de tous les moyens, c’est d’attendre patiemment qu’il plaise aux essaims de sortir, & de les recueillir quand ils ont pris leur essor. Il est très-incommode, à la vérité, de veiller des ruches pendant cinq ou six semaines ; & une méthode qui