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§. II. Des Acides Animaux.

Principes universels toujours en action, ou plutôt causes de toute action, de toute fermentation, les acides animent & vivifient les trois règnes de la nature. Répandus & pour ainsi dire noyés dans les fluides animaux, ils circulent avec eux : tant qu’ils sont dans une juste proportion, l’équilibre se conserve, la dissolution des alimens, leur digestion, leur précipitation s’opèrent exactement. Ils tempèrent l’effervescence que le sang, la bile & les autres liqueurs pourroient acquérir. Indispensables à l’économie animale, c’est à eux qu’est due la santé, comme en conviennent Hyppocrate & les plus habiles médecins. Toujours en mouvement, si quelque cause particulière vient à les arrêter, à les fixer, à enchaîner leur activité, bientôt différentes maladies prennent naissance.

La chimie est parvenue à extraire un acide de quantité de substances animales. M. Homberg a démontré, par un travail assez complet, que le sang & la chair de l’homme, du bœuf, du veau, de la brebis, du mouton, du brochet, du canard, du cochon, de la vipère, de la limace, &c. contenoient un acide assez développé pour agir très-sensiblement sur les teintures bleues des végétaux : il en conclut même, qu’il en fait une partie essentielle contre le sentiment de M. Lind, qui, dans son Traité du scorbut, a avancé que le sang d’un animal vivant n’a jamais été trouvé acide ou alkali. M. Poli, dans un ouvrage italien intitulé, Triomphe des acides, en admettant les acides dans l’économie animale, soutient qu’ils ne passent jamais dans le sang ; mais qu’après leur dégagement des alimens, ils se précipitent dans les intestins avec les matières excrémenteuses. Ces deux assertions sont absolument détruites par les expériences de M. Homberg, & les analyses du sang & de la chair faites par des savans chimistes.

Les humeurs, telles que le lait, la graisse, le chyle, le beurre, l’urine, la sueur, le sperma-céti, &c. &c. offrent, à l’analyse chimique, un principe acide en plus ou moindre quantité. Le principe mucoso-sucré que Van-Bochante a trouvé dans la bile, doit faire conclure qu’elle contient encore un acide, puisque tout sucre en contient, M. l’abbé Fontana pense que tous ces acides que l’on extrait des différentes substances du règne animal, ne sont qu’un seul & même acide, l’air fixe : plusieurs espèces d’animaux, comme les mouches, les fourmis, quelques chenilles, entr’autres, la grande chenille à queue fourchue, & en général, presque tous les insectes ont offert encore à ce chimiste un principe absolument analogue à cet acide. Mais il est un acide qui paroît être absolument particulier au règne animal, l’acide phosphorique que l’on retire de l’urine, des os & de la corne de cerf.

§. III. Des Acides Végétaux.

Presque tous les acides animaux ne s’obtiennent que difficilement purs : unis intimément à une huile animale, ce n’est que par des expériences recherchées qu’on peut les avoir isolés. Il n’en est pas de même dans le règne végétal ; la nature nous