Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/333

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animaux, leurs émanations, loin d’affecter l’air de la même manière que la respiration animale qui se rend méphitique, produisoient, au contraire, des effets qui ne tendoient qu’à conserver l’atmosphère douce & salubre, lorsqu’elle étoit devenu nuisible. La purification de l’air, par la végétation, fut, dès lors, une découverte des plus importantes. M. Marigues, en France, en 1778, conçut le dessein de s’assurer, par des expériences décisives, de l’effet positif des émanations végétales sur l’air que nous respirons, & si effectivement l’odeur des plantes & des fleurs vivantes altéroit ou n’altéroit point l’air. La suite nombreuse de ses expériences est détaillée dans le Journal de Physique, 1780, p. 363. La conclusion qu’il en tire est que les émanations ou odeurs de toutes les fleurs odorantes ou inodores, & celles des fruits, rendent l’air méphitique, & le vicient à un tel point, qu’un animal ne pourroit y vivre ; il présume même qu’il y a dans les émanations des fleurs épanouies, indépendamment de l’esprit recteur qui constitue leur partie odorante, une vapeur méphitique qui doit en différer & en être distinguée ; il lui semble même que cette vapeur est plus abondante dans de certaines fleurs & certaines plantes que dans d’autres.

M. Marigues n’avoit qu’un pas à faire pour trouver la vérité, celui de chercher à obtenir cette vapeur méphitique indépendamment des émanations. En changeant son appareil, il auroit eu ce succès. Si, au lieu de renfermer ses fleurs dans un bocal vuide, il les eût placées dans un bocal plein d’eau, la vapeur méphitique ou l’air fixe se seroit échappé seul des plantes. C’est ce qu’a fait M. Ingen-House.

Son principal objet étoit d’examiner la nature des bulles d’air qui s’échappent des différentes parties des plantes que l’on plonge sous l’eau. L’appareil dont il s’est servi, est celui dont nous avons parlé plus haut. Voici à peu près ce qu’il a observé : (Expériences sur l’air des végétaux, 1780.) que la plupart des feuilles, des fleurs, des racines, des fruits même, se couvrent de ces bulles, lorsqu’on les plonge sous une eau quelconque au soleil, ou en plein jour, dans un lieu ouvert & bien éclairé, mais infiniment plus dans de l’eau de source fraîchement tirée : que ces bulles ne sont pas produites par la chaleur du soleil qui raréfie l’air adhérent aux feuilles, puisque beaucoup produisent des bulles dans l’instant même qu’on les plonge dans l’eau la plus froide, quoiqu’elles soient échauffées par le soleil dans le moment qu’on les sépare de l’arbre & qu’on les plonge dans l’eau ; que les feuilles ne poussent pas des bulles d’air après le coucher du soleil, ou du moins fort peu, mais que celles qui étoient déjà sorties ne disparoissent point, malgré le froid de la nuit. Ce savant conclut de l’apparition subite de ces bulles, de leur accroissement qui se fait par degré dans l’eau froide exposée à la clarté du jour, de la cessation de cette émission d’air pendant la nuit, & dans l’ombre pendant le jour, dans la même eau, que ces bulles ne doivent pas leur origine à l’air existant dans l’eau, & pompé par les feuilles, ni à la raréfaction de l’air