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vince. Ceux-ci ont la facilité de se reproduire de drageons ; & si on veut les multiplier, il suffit de couper le tronc de l’arbre entre deux terres, ou de l’éclater à la naissance des racines. (Voyez ce qui est dit de l’acacia, tome I, page 208.) Si on les greffe, ils poussent beaucoup de drageons.

Le cerisier de Sainte-Lucie ou Mahaleb, (voyez ce mot) est encore très-bon pour recevoir la greffe de tous les cerisiers ; il réussit assez bien même dans les plus mauvais terrains, & très-bien dans les terrains passables.

Toutes les manières de greffer sont bonnes pour le cerisier : l’écusson, à la pousse des jeunes sujets ; en fente, lorsque le pied est fort, ou lorsque l’on veut changer la tête de l’arbre, sont les méthodes les plus sûres de greffer. (Voyez le mot Greffe)

Il faut bien aimer à tyranniser les arbres pour disposer leurs branches contre des murs, pour les tailler en espalier ou en buisson. Cet arbre a conservé, malgré nos soins, son principe sauvage ; il veut pousser à sa fantaisie, & suivant la loi prescrite par l’auteur de la nature. La serpette meurtrière du jardinier veut le contraindre de se prêter à ses volontés, il dépérit & meurt promptement.

Ne cherchez pas à donner à l’arbre destiné au plein-vent une forme gracieuse & symétrique, sans quoi vous payerez cher votre attention déplacée. S’il meurt des branches, laissez-les sécher sur pied, un coup de vent les cassera, & l’arbre sera net. Quant aux branches chargées de gomme, ce qui arrive toujours par une transpiration arrêtée, ne les abattez pas, elles périront d’elles-mêmes ; leur retranchement feroit une nouvelle plaie à l’arbre, où il se formeroit une plus grande quantité de gomme. En général, le cerisier à fruit en cœur se coiffe & pyramide bien ; ceux à fruit rond se chargent de trop de branches ; mais comme la nature n’a rien fait en vain, & comme cet arbre n’est pas créé pour le simple coup-d’œil, il aura soin de se débarrasser de ses branches superflues. Ce langage paraîtra singulier à ceux qui ont toujours la serpette à la main ; mais qu’ils prennent la peine de comparer la durée de l’arbre façonné suivant leurs caprices, ou celle de l’arbre conduit par les mains de la nature. En un mot, la véritable forme du cerisier est le plein-vent.

J’avoue, malgré ce que je viens de dire, qu’un mur garni de branches de cerisier disposées en espalier offre un joli coup-d’œil ; dans la première saison, la multiplicité de ses fleurs & leur ordre symétrique flattent la vue ; ensuite le vert foncé des feuilles contraste parfaitement bien avec la vivacité & la couleur tranchante des fruits, depuis qu’ils rougissent jusqu’à leur parfaite maturité. Ce que j’ai dit de la taille du cerisier à plein-vent s’applique en partie à celui-ci, c’est-à-dire, qu’il faut être très-discret dans la taille & dans l’ébourgeonnement. C’est de la multiplicité des brindilles (voyez ce mot,) que dépend celle des fruits. Tous les bourgeons de cerisiers à fruit rond sont, comme on l’a remarqué, menus, fluets, & par conséquent ils se prêtent avec une facilité extrême au palissage ; il vaut mieux conserver & palisser ceux qui ont poussé sur le devant des tiges que de les couper. La multiplicité des branches à fruit fait que l’arbre a