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Quelques chymistes rencontrant une très-grande quantité de fer dans les cendres des végétaux, ont pensé que leurs couleurs étoient dues à ce métal, parce que, dans les opérations chymiques, soit naturelles, soit artificielles, il est susceptible de prendre toutes sortes de couleurs ; mais, pour qu’on pût admettre cette hypothèse, il faudroit supposer que dans chaque nuance particulière, le fer se trouvât exactement combiné avec le principe qui lui fait prendre cette couleur, & c’est ce qui n’a pas encore été démontré suffisamment.

Les mêmes difficultés se présentent dans l’hypothèse de M. Opoix & de M. le Chevalier de Mustel, qui trouvent, dans le phlogistique, la cause principale des couleurs végétales.

Le dernier systême sur l’origine des couleurs des plantes, est de les rapporter à la lumière qui les éclaire. Les nombreuses expériences de plusieurs savans, & entr’autres de MM. Bonnet, Meese & Sennebier ont paru le confirmer jusqu’à présent, ou du moins, il est certain que la lumière a la plus grande influence sur les couleurs des plantes ; que sa présence les anime, & que son absence les dénature & les fait disparoître, principalement la couleur verte : elle passe insensiblement à l’ombre, & la plante devient malade & languissante, lorsqu’elle est privée de ce principe vivifiant. Cette maladie de langueur se nomme étiolement. (Voyez ce mot & celui de Lumière)

Telle est, en peu de mots, l’analyse des différens systêmes, imaginés pour expliquer l’origine des couleurs qui décorent les fleurs ; ils ne s’éloignent pas absolument les uns des autres, & il pourroit se faire que dans leur réunion, on trouvât l’explication de ce phénomène : quelques observations que nous avons faites, plusieurs expériences que nous avons ou répétées ou tentées, nous portent à se croire, & nous allons exposer ici notre sentiment, en le soumettant au jugement des savans.

Nouveau Systême sur les couleurs des Plantes.

La couleur des plantes dépend d’une matière colorante propre, qui réside dans le parenchyme, & dont la nature est susceptible de différens degrés de fermentation, qui produisent, ou les diverses nuances, ou le passage de l’une à l’autre.

Les différentes expériences chymiques nous ont démontré que dans toutes les parties des plantes il existoit une substance colorante, ou extractive, ou résineuse, ou extracto-résineuse, & cette substance réside dans le parenchyme.

Prenez de la gaude, de la garance, du bois d’Inde, &c. ; laissez-les macérer dans l’eau, & vous aurez une dissolution extractive, jaune ou rouge, suivant la nature des plantes que vous aurez employées. Si vous faites bouillir fortement dans de l’eau, du brou de noix, du sumac, de l’écorce d’aune, &c., la substance résineuse qu’elles contiennent se dissoudra dans l’eau à l’aide de la chaleur & de la partie extractive dissoute ; mais elle se précipitera à mesure que l’eau se refroidira. Ici nous avons dans la même matière colorante, plus ou moins fauve, deux principes, l’un dissoluble dans l’eau, qui est l’extractif, & l’autre