Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/667

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Abondance, Amélioration ; si toutes vos possessions, vos bâtimens, vos animaux de labourage, vos troupeaux, &c, sont dans le meilleur état possible ; enfin, si vous avez des avances, vous pouvez défricher en raison de ces mêmes avances, & non au-delà. Dans ce cas, cherchez à arrondir vos champs, & à ne laisser rien d’inculte dans tout ce qui vous environne. L’exploitation d’un champ éloigné de la métairie, coûte le double par la perte du temps, consommée en allées & venues, & elle reste toujours imparfaite.

Si vous avez près de vous des flaquées d’eau, des parties marécageuses, il ne faut rien épargner jusqu’à ce qu’elles soient en valeur. Il en résultera deux grands avantages : acquérir un sol précieux, & rendre salubre l’air que l’on respire.

Si l’objet à défricher est formé par un sol léger, par un rocher qui se brise aisément, & dont le grain se désunisse & se réduise avec facilité en terre ; enfin, si la situation de ce terrein est bien exposée au midi, & garantie par un bon abri, (Voyez ce mot) plantez une vigne, & choisissez les plants reconnus pour donner le meilleur vin.

Tout terrein bon par lui-même, & susceptible de produire du bon grain, ne doit jamais être sacrifié aux vignes. Ce seroit mal entendre ses intérêts, & nuire à ceux de la masse générale de la société. (Voyez l’article Vigne)

Si le sol est maigre & en état de ne produire habituellement que du petit grain, il ne vaut pas la peine d’être mis en culture réglée ; c’est le cas de le défricher uniquement pour le couvrir de bois.

Toutes ces considérations une fois bien établies, & après avoir bien raisonné l’opération à laquelle on va se livrer, le premier soin est de songer aux chemins qui doivent y conduire ; sans cette précaution, les bêtes employées aux charrois, & les voitures sont plus abîmées dans un an qu’elles ne le seroient en quatre ou cinq, & le prix de l’exploitation augmentera du double. Le second, si le terrein est en pente, d’ouvrir un fossé sur toute la longueur de la partie supérieure, afin de détourner les eaux, & les porter sur les côtés ou leur donner une issue qui ne nuise point au sol. Si l’étendue est vaste, le fossé supérieur ne sera pas suffisant ; il est nécessaire encore de couper le terrein par de nouveaux fossés & dans le sens qui leur convient. On espèreroit vainement avoir de bonnes récoltes en grains dans une situation trop droite, il faut que la pente soit au plus de quarante-cinq degrés ; une inclinaison plus rapide nécessite la culture des bois ou des vignes, si on est assez riche pour y élever en pierres sèches, terrasses sur terrasses, comme on le pratique au territoire de Côte-Rôtie & le long du Rhône, depuis Vienne jusqu’un peu au-delà de Tournon.

Si l’endroit à défricher est en plaine, il est important de reconnoître le lieu le plus bas & le plus susceptible de procurer un dégagement facile aux eaux ; si cette expulsion des eaux est impossible, renoncez au défrichement ; au contraire, augmentez leur retenue, convertissez le sol en étang. ; mais ayez soin que les bords, même dans les plus grandes eaux, ayent au moins trois pieds de profondeur, sans quoi vous rendrez l’air mal-sain.