Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/107

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quelques endroits, est réparable par ces branches que j’appelle adventices (voyez ce mot) qui percent à travers la peau. »

« L’art de l’ébourgeonnement n’est autre chose que la suppression sage & raisonnée des rameaux superflus, que le choix judicieux de ceux qu’il faut palisser, que ce goût & cette intelligence pour n’en conserver qu’une quantité suffisante. Il se répète autant de fois que les bourgeons, en s’allongeant & se multipliant, donnent lieu à le renouveler. Le point essentiel est de fuir également la confusion & le vide. Pour éviter celui-ci, il faut toujours tirer du plein au vide, mais sans forcer, sans croiser, sans causer aucune difformité. On évite la confusion, en laissant entre les bourgeons un espace suffisant pour qu’ils ne se touchent point, & que leurs feuilles ne jaunissent ni ne tombent. »

« L’époque de l’ébourgeonnement n’est pas plus fixe que celle de la taille. On doit se régler sur la saison, l’âge, la vigueur des arbres, le climat, les expositions différentes, & les circonstances particulières de l’abondance ou de la disette des fruits. »

« Les Montreuillois le diffèrent jusqu’à la mi-mai, ou dans le mois de juin, lorsque les bourgeons de leurs arbres ont un pied ou quinze pouces de long. C’est moins la propreté & la régularité que le besoin des arbres qui les guide. Voici leurs principales raisons. 1°. En ébourgeonnant de bonne heure, on met le fruit au grand air ; comme en avril & au commencement de mai, il est encore fort tendre, il est en danger d’être frappé du soleil & de tomber. 2°. En retardant & laissant alonger les bourgeons, ne supprimant que tard les surnuméraires, les arbres ne s’épuisent point à en repousser de nouveau. 3 °. La gomme est plus à portée de fluer au mois d’avril que lorsque l’écorce est plus formée. 4°. À peine les arbres commencent-ils à se remettre des fatigues qu’ils ont essuyées par les tailles faites à leurs rameaux, à peine les cicatrices commencent-elles à se recouvrir, qu’on leur en fait de nouvelles. 5°. Tant que le fruit est à couvert sous cette espèce de forêt hérissée de bourgeons, il jouit d’une fraîcheur qui contribue beaucoup à son accroissement ; les bourgeons d’ailleurs, se trouvant à l’aise, poussent & s’allongent ; leurs yeux, leurs boutons, pour l’année suivante, se forment & se façonnent. Tous ces avantages disparoissent dans l’ébourgeonnement précipité : ce qui vient d’être dit, est relatif au climat de Paris, & attendre jusqu’au mois de juin seroit trop tard pour les provinces méridionales : le climat dicte le temps de l’ébourgeonnement. »

« Doit-on ébourgeonner par provision, & remettre à palisser (voyez ce mot) à un autre temps ? Cette façon de travailler a des suites fâcheuses. 1°. Les fruits dénués de l’appui des bourgeons qu’on leur a ôtés, sont abattus par les vents. 2°. Les feuilles des bourgeons du bas, après avoir jauni, tombent & font porter les yeux pour l’année suivante. 3°. De nouvelles occupations font oublier le palissage. 4°. En ébourgeonnant, à vue de pays, on court risque de supprimer certains bourgeons mieux placés que ceux