Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/664

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ailleurs plus court ; dans quelques endroits, le fléau proprement dit est plus gros que le manche & plus court ; dans d’autres, aussi gros l’un que l’autre. Lequel doit-on préférer ? Chacun a son avantage & son inconvénient. Le manche long & le fléau court amène un coup plus fort ; le fléau long & le manche court frappe sur une plus grande surface, & n’a point autant de force. Celui à fléau court, gros & d’un bois léger, fait mieux trémousser la paille ; & celui à fléau égal au manche en grosseur & en longueur, n’agit pas aussi bien sur la paille. Un point essentiel consiste dans la manière dont les courroies sont passées les unes dans les autres. Il faut que le fléau tourne facilement lorsque le batteur le ramène & qu’il frappe son coup. Ce n’est pas la force de ce coup qui, jusqu’à un certain point, détache le grain de l’épi ; le contre-coup & le soubresaut y contribuent beaucoup plus. C’est la raison pour laquelle les batteurs ne frappent pas ensemble, mais l’un après l’autre, afin que le fléau qui tombe, trouve la paille soulevée par le coup qui a précédé. Quand il y auroit vingt batteurs sur une aire, il faut que les coups se succèdent sans interruption, & que jamais deux fléaux ne frappent à la fois. Il est bon que le bout du fléau soit terminé par un nœud du bois ; alors il s’use moins & frappe plus fort, attendu que le point le plus pesant se trouve au bout. Si ce nœud est trop gros, par conséquent trop pesant, il sera très-difficile au batteur d’amener un coup horizontal sur la paille, & toute la force se trouvera au bout & non pas dans l’étendue du fléau ; que si le bout est plus mince que celui attaché aux courroies, il agira plutôt comme un fouet que comme un fléau.

On place de différentes manières les courroies, afin d’assujettir ensemble le manche & le fléau, sans faire perdre à ce dernier sa mobilité. Deux lanières de cuir sont disposées en croix au haut du manche, fortement liées sur lui, & elles le débordent d’un pouce. De semblables courroies, également attachées, placées comme les premières, & qui les traversent, assujettissent le fléau au manche. Quelques-uns se contentent d’une seule lanière, soit au manche, soit au fléau. Cette méthode est défectueuse, en ce que le frottement sans cesse répété, use ces lanières les unes contre les autres, & le batteur est sans cesse obligé d’en suppléer d’autres & de ratacher : on perd beaucoup de temps. Il me paroît qu’on doit préférer le manche armé d’une seule courroie large & épaisse, ainsi que le fléau, & qui sont l’une & l’autre réunies par un double bouton de bois, de cuivre, & à deux têtes arrondies. Tout le monde connoît les boutons de culotte, soit en ivoire, en corne ou en bois : ils ont deux têtes aplaties ; voilà en quoi ils diffèrent de ceux dont je parle, & par le rapprochement de leurs deux têtes. Si les premiers avoient des arrêtes vives comme les derniers, la courroie seroit plutôt usée ; mais avec les têtes arrondies par leur sommet, le frottement use très-peu la courroie qui glisse par-dessus. Dans plusieurs provinces, le sommet du manche, d’un bois très-dur, est terminé en bouton plat par-dessous & arrondi par-dessus. Ce bouton entre dans la courroie épaisse, ou simple, ou croisée, (ce qui vaut