Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de les mutiler, &c. ; quant à moi, je sais que la nature ne les a pas donné à la plante pour exercer la serpette du cultivateur ; au surplus, que l’on plante un pied de garances ainsi que je l’ai dit, & que l’on plante à côté un autre pied de racines écourtées & mutilées, & on verra la différence, soit pour la beauté de la plante, soit pour la grosseur & la multiplicité des racines. L’expérience donnera la solution du problème. Je conviens cependant qu’un morceau de la racine garni d’un simple bouton, suffit pour produire dans la suite un pied de garance ; mais quelle différence dans la végétation & dans les produits ! le vrai & le plus solide bénéfice d’une garancière, tient à la belle venue ; c’est ce qu’on ne doit jamais oublier. Il en est ainsi du conseil donné par des auteurs, de n’espacer les grains ou les plants de garance que de trois pouces, afin qu’il ne s’amusent pas à pousser des racines latérales, & afin que la maîtresse, ou pivot profite davantage ; en les espaçant du double, le pivot travaillera encore mieux, parce qu’on aura beau faire, il poussera dans l’un & dans l’autre cas des racines horizontales & jaunes. Si elles ne trouvent pas la place pour s’étendre, elles nuiront aux progrès de la mère racine, & absorberont une partie de sa nourriture.

Je n’ai jusqu’à présent parlé que de la méthode des levantins ; il faut faire connoître les autres établies dans le royaume. En Flandre, par exemple, les planches ont dix pieds de largeur, & dix rangées de garance ; à l’extrémité de chaque planche, on laisse un sentier d’un pied & demi de largeur : ici, à côté de chaque rangée, est un sillon d’un pied ; là, chaque sillon est égal, en largeur, de celui de la rangée. Il n’y a rien de fixe à ce sujet ; mais ces méthodes ne permettent pas les recouvremens des plantes à la manière des levantins, dont il sera parlé ci-après.

III. De la conduite d’une garancière. Qu’elle soit garnie ou avec des graines, ou avec des plants enracinés ; lorsque les premières sont hors de terre, ainsi que les secondes, il est nécessaire de donner de l’eau, ou avec des arrosoirs, ou par irrigation, si le temps est sec, & qu’il n’y ait point apparence de pluie ; dans le premier cas on arrose sur la planche même, & dans l’autre, on arrose par irrigation l’entre-deux des sillons. Il ne faut pas multiplier ces arrosemens.

Quelques auteurs conseillent de semer des grains sur le semis des garances : cette méthode est abusive ; les racines du blé nuisent à la végétation de la garance, & ainsi tour-à-tour.

On a dit plus haut que les levantins replantaient en septembre & octobre, parce que, dans leur climat, & même dans celui de nos provinces méridionales, les racines travaillent pendant l’hiver. (j’ai vérifié ce fait) On a dit également qu’ils laissoient des plates bandes de six pieds de largeur, & voici leur usage : depuis l’époque du semis, à la fin de février, ou dans le courant de mars, ou depuis celle de la transplantation jusqu’au mois de septembre suivant, elles servent à cultiver du grain ou du jardinage, comme pois, haricots, gros millet ou maïs, &c. ; mais dans le courant