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n’indique aucune époque déterminée ; mais la couleur de la plante la fixe. Il faut, s’il est possible, choisir un jour humide, & lorsque la terre est humectée, afin que la graine tombe moins ; l’opération générale est plutôt faite. Lorsque l’écorce de la plante perd sa couleur verte, lorsqu’elle commence à se changer en jaune, enfin, lorsqu’une partie de la graine est mûre, c’est le temps de tirer la plante de terre. Si on est forcé de pratiquer cette opération pendant la sécheresse, il faut alors préférer de la faire de grand matin à la rosée, on conserve plus de graine. Il convient de tirer de terre la plante avec sa racine ; les tiges en paroissent plus longues & se vendent mieux, quoique la partie colorante soit très-foible dans la racine ; cependant si on a à traiter avec un teinturier raisonnable, & dans la supposition qu’on ait des troupeaux, on peut couper les tiges ras terre, parce que ce tronçon repousse, & les nouvelles feuilles qu’il produit deviennent une excellente nourriture pour les troupeaux. Pour peu que les pluies soient fréquentes après la récolte générale de la gaude, le troupeau peut y passer deux ou trois fois à différentes époques. Si on laissoit trop mûrir la plante, elle ne repousseroit pas. Il y a peut-être plus de profit à arracher rigoureusement, parce que l’instrument tranchant laisse toujours hors de terre des tronçons de trois ou quatre pouces, ce qui est une perte réelle.

À mesure qu’on arrache, on fait de petits paquets qu’on lie avec de la paille ; on les réunit ensuite en plus gros, & on les transporte près du logis. Là, les paquets sont détachés, & chaque brin est placé perpendiculairement contre des murs, des haies, &c. où il reste exposé à toute l’activité du soleil, pendant un, deux, ou trois jours, suivant la chaleur du climat. On étend ensuite sur le sol de grands draps sur lesquels on bottèle les brins en paquets de 12 à 15 livres, & les capsules qui renferment la graine la laissent échapper sur les draps ; ces bottes ensuite réunies plusieurs ensemble, sont portées dans des greniers, sous des hangards, où règne un courant d’air. Si les bottes étoient amoncelées encore humides, la fermentation s’y établiroit, & la partie colorante & pulpeuse seroit bientôt altérée.

Suivant les cantons, les climats, &c. aussitôt que la gaude est arrachée de terre, ou laboure le sol, après avoir fait passer les moutons plusieurs jours de suite & on commence à disposer le sol à recevoir dans la suite les grains d’une nouvelle récolte de seigle, de blé, &c.


GAYAC. Arbre de Virginie, de la Jamaïque ; il est inutile de le décrire, puis que nous ne pouvons le cultiver en Europe. Le bois de Gayac est d’une couleur grise, tirant sur le noir, il a une odeur aromatique & douce, une saveur âcre, piquante, un peu amère ; l’écorce du bois est grise en dehors, blanchâtre intérieurement, inodore, d’une saveur amère & nauséabonde. Il découle de cet arbre un suc vulgairement nommé, résine de gayac, lorsqu’il est devenu concret par l’exsiccation ; cette résine est friable, extérieurement brune, intérieurement rousse, d’une odeur aromatique douce, d’une saveur