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léger, il s’envole, & s’attache à tous les corps qu’il rencontre ; Ces petits grains se fondront aussitôt que l’on sera dans un air plus chaud, & les souliers seront alors couverts d’une véritable boue.

La gelée mérite l’attention du philosophe, qui réfléchit sur tous les phénomènes qui passent successivement sous ses yeux, par ses effets sur l’économie animale & végétale. Au mot Froid nous sommes entrés dans quelques détails à ce sujet, sur-tout pour l’économie animale ; nous allons ajouter quelques observations intéressantes, par rapport à l’économie végétale. Une infinité de plantes périt par la moindre gelée ; c’est en général toutes celles qui, nées dans des climats chauds, sont transportées dans un nouveau, où elles ne retrouvent pas la température qui leur est nécessaire. Les plantes de nos climats ne sont pas cependant à l’abri de la rigueur des frimats. Si la gelée est forte & long-temps continuée, elles en deviennent les victimes ; mais il faut observer, en général, qu’il n’y a guère que les plantes annuelles qui périssent aux premiers froids ; l’état de langueur où elles sont à l’approche de l’hiver, leur vieillesse ne conserve plus cette vigueur, cette chaleur vitale qui donne aux autres plantes la force de braver les gelées. Si l’humidité de la terre se gèle à une certaine profondeur, les racines en sont affectées ; le chevelu se trouve quelquefois coupé & brisé par les glaçons qui se trouvent dans la terre ; les sucs nourriciers devenus solides, ne peuvent plus pénétrer à travers les racines, & aller porter la vie dans la tige & les branches ; l’extrémité des branches, les bourgeons, plus aqueux & plus succulent que le reste, sont aussi les parties les plus susceptibles de geler. Les gros troncs d’arbre n’en sont pas à l’abri dans les grands hivers, & ils se fendent quelquefois, suivant la direction de leurs fibres, & même avec bruit.

On remarque ordinairement sur les arbres auxquels cet accident est arrivé, une arrête ou une espèce d’exostose formée par la cicatrice qui a recouvert ces fentes ; elles restent enfermées dans l’intérieur de l’arbre, sans se réunir : ces fentes intérieures portent souvent le nom de gélivure, de cadran. (Voyez ce qui a été dit au mot Dégel, Brûlure des arbres). Un effet assez commun de la gelée, suivant quelques auteurs, est la production du faux-aubier (Voyez à ce mot ce que nous en pensons).

La gelée ne fait jamais plus de ravage que lorsqu’elle est accompagnée d’humidité : cette humidité s’attachant à tout ce qu’elle rencontre, forme ensuite autant de petits glaçons qui affectent nécessairement la partie sur laquelle ils se posent. (Voyez le mot Brûlure, jardinage). C’est encore bien pire, lorsque cette humidité a pénétré la superficie des feuilles ou des jeunes tiges ; car alors ils déchirent l’épiderme en se formant, causent une violente détention, & rompent toutes les parties organiques qui les renferment. S’il est des cas où la gelée fasse encore plus de mal, c’est lorsqu’après un dégel il survient une gelée subite ; il est rare que les plantes alors échappent aux maux que cette alternative occasionne. La surabondance d’humidité