Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/573

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son intérêt, pour sacrifier ses bonnes olives ? Point du tout, il commence par presser celles ramassées sous les arbres, & à moitié pourries, ou qui auront subi, dans l’amoncèlement, le plus fort degré de fermentation. Dès-lors, le principe de rancidité est établi dans ces cabas neufs, & influera sur toutes les pressées suivantes. On dira que lorsque l’on échaude la pâte à grands flots d’eau bouillante, & lorsqu’on soumet les cabas à la presse, cette eau entraîne l’huile essentielle avec l’huile grasse ; cela est vrai, jusqu’à un certain point ; mais rien n’entraîne les débris du fruit ; son parenchyme se niche entre les brins de spart, dont le cabas est composé, & plus on presse, plus il s’y incruste. Que l’on examine l’épaisseur d’un cabas qui a servi, & qu’on la compare à celle d’un cabas neuf, & on se convaincra de cette incrustation. Examinez, & vous vous convaincrez mieux que ce que je pourrois dire.

Le grand germe de la mauvaise odeur, de l’acrimonie & de la rancidité, est dans les cabas vieux. Lorsque la saison de presser est passée, on lave à l’eau chaude les vieux cabas en état de servir l’année suivante ; on les met sur le pressoir, afin de faire écouler l’eau du lavage ; enfin, on les laisse sécher avant de les renfermer. Il vaudroit tout autant les laisser tels qu’ils sont, puisque l’eau n’est pas capable de dissoudre l’huile essentielle & grasse, ni d’extraire les ordures nichées entre les brins de spart. Ce vieux oing rancira de plus en plus dans le cours de l’année. Si on trouve que je porte les choses trop loin, quoique je ne sois ici que le simple narrateur de ce que je vois chaque année, j’admets que les cabas vieux ou neufs ne sont pas dans le cas d’agir sur l’huile qu’ils serviront à extraire ; mais comme dans les moulins banaux chacun passe à son tour, il est impossible de faire de la bonne huile. Tout propriétaire a des olives tombées sous l’arbre, des olives mûres, des olives vertes, des olives fermentées, à faire moudre, ou peut-être un unique mélange de toutes ces olives. S’il a de bonnes olives, il les fait passer les premières, & conserve les plus mauvaises pour la fin ; par conséquent, celui qui vient après lui, doit avoir une huile viciée par l’huile essentielle & fétide qui reste dans les cabas, ainsi qu’une portion de la pâte. La bonne règle exigeroit que, dans un attelier, il y eut un double équipage de cabas, de pressoirs, de moulins, de piles, &c. Le premier seroit uniquement destiné aux olives de qualité ; & le second, aux olives ramassées sur terre ou fermentées.

J’ai indiqué les vices de fabrication, & qui agissent d’une manière si marquée sur les huiles. On a eu la plus grande attention à bien choisir les olives, on a séparé l’huile vierge de l’huile échaudée ; enfin, on prend beaucoup de précautions pour avoir de bonne huile, & cependant, quelques mois après on est tout étonné de lui trouver un goût fort & exalté. Qu’arrive-t-il ? on s’en prend à la saison, c’est plutôt fait, & on ne veut pas remonter au vrai principe. Je le répète, il ne faut qu’un petit atome d’huile essentielle pour infecter une