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fromage, en la tournant & la retournant, jusqu’à ce qu’elle soit partout également échauffée, & qu’elle ait acquis une consistance un peu ferme. On tire alors ce fromage de la chaudière ; on le met sur un linge blanc, & par-dessus un poids, afin qu’il soit dans le cas de bien s’égoutter. On le laisse ensuite égoutter pendant cinq à six heures, après quoi on le descend à la cave sur des tablettes bien propres.

Cinq jours après que ce fromage a été à la cave, il se forme sur sa superficie une espèce de farine : alors on a l’attention de saupoudrer avec du sel bien égrugé & bien sec. Le lendemain on le retourne, & on le sale de même de l’autre côté. Trois jours après on ôte le linge dans lequel on l’avoit enveloppé ; on le nettoie, & on le laisse ainsi s’affermir jusqu’au lendemain qu’on le sale encore, mais plus que les trois premiers jours. On l’enveloppe ensuite dans le même linge, & on continue tous les jours de le retourner & de le saler. Du reste on ôte, de trois en trois jours, le linge & la croûte farineuse qui se forme incessamment. Cette opération se renouvelle ainsi pendant un bon mois, au bout duquel temps le fromage est entièrement fait.

Au surplus, il faut plus ou moins de sel pour ces sortes de fromages, suivant qu’ils sont plus ou moins cuits ; mais ils n’en prennent pour l’ordinaire que ce qu’il leur faut. Lorsqu’il en a saisi la quantité qui lui convient, on le tourne & le retourne tous les jours, jusqu’à ce qu’il soit bien sec ; ensuite on le ratisse de tous les côtés avec le dos d’un couteau, & on le met dans une chambre où l’on a l’attention de le changer de place de quinze en quinze jours, & de le ratisser exactement, ainsi que les planches, toutes les fois qu’on le change de place. Il demande ces mêmes soins pendant 7 ou 8 mois.

Section II.

Des Fromages faits avec le lait de vaches, & qui n’est point cuit.

I. Fromage de Brie. On doit à M. de la Bretonnerie, auteur d’un nouvel ouvrage d’agriculture, plein d’excellentes vues, intitulé Correspondance Rurale, à Paris, chez Onfroy, 1783, des moyens de préparer ce fromage si recherché à Paris & dans les provinces voisines, mais si différent par la qualité, suivant les cantons, parce qu’on ne prend pas par-tout les mêmes précautions. L’auteur va parler.

« Il y a plusieurs observations à faire ; 1°. sur la parcimonie préjudiciable de quelques faiseuses de fromage qui retirent une partie de la crème quand elle est montée sur le lait, pour en faire du beurre avant que de dresser leurs fromages ; ce qui en ôte la qualité ; 2°. sur la nécessité de ne pas se servir, comme font beaucoup de gens, de présure rance & d’une odeur forte pour faire cailler le lait, & dont on met encore une trop forte dose, ce qui sèche les fromages, & leur donne un mauvais goût ; mais il faut se servir d’une caillette fraîche de veau, bien lavée & nettoyée, qu’on remplit de sel & de poivre pour la conserver[1], qui n’a aucune odeur, &

  1. Note du Rédacteur. Il ne paroît guère probable que le poivre la conserve. Peut-