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chages d’arbres, garnis de feuilles, & coupés au mois de septembre, afin de les accoutumer à brouter. Dès le commencement de mai, ils sont menés indistinctement dans toute espèce de pâturage, parce que les habitans de Sologne sont persuadés qu’un agneau, tant qu’il tète, ne peut jamais contracter la pourriture. (Voyez ce mot) Persuadés également que vers la fin du même mois, ces jeunes animaux n’ont plus besoin de lait, ils traient les mères pour faire du beurre, & souvent ils commencent à les traire plutôt.

Si les bergères écoutoient les ordres de leurs maîtres, elles écarteroient presque toujours les brebis & les moutons qu’on ne veut pas engraisser, des pâturages humides, qui leur sont funestes. Mais, souvent, malgré les défenses, elles les y laissent aller, ou par négligence, ou dans le dessein de leur procurer une nourriture plus abondante.

Les brebis, les moutons & les agneaux paissent dans les chaumes de seigle, après la récolte qui s’en est faite en juillet ; on ne les mène paître ailleurs qu’à la fin de septembre.

La Sologne, pays compris entre la Loire & le Chèr, est presque perpétuellement abreuvée d’eau. Le sol en est composé de sable & d’argile qu’on trouve à deux pieds ou deux pieds & demi de profondeur. Il n’y a nulle part un aussi grand nombre d’étangs. Presque par-tout on y voit des plantes aromatiques.

Les bergeries de Sologne, où l’on renferme les bêtes à laine, sont humides, mal closes & sans litière ; souvent ces animaux sont aux champs par la pluie, & confiés à des jeunes filles, incapables d’attention. Que résulte-t-il de toute cette conduite ?

1°. Que les brebis pleines souffrent de la faim pendant l’hiver, & sur-tout dans les derniers mois de leur gestation, temps où elles auroient besoin d’une nourriture plus substantielle & plus abondante que jamais.

2°. Que les agneaux qui en proviennent sont foibles, languissans, & remplis d’obstructions.

3°. Qu’ils se gorgent d’herbes humides dans les pâturages où on les conduit, & avec d’autant plus d’avidité, que leurs mères ont moins de lait.

4°. Qu’étant déjà d’une constitution foible & lâche pendant la première année, ils ne peuvent supporter, dans l’hiver suivant, les effets de la faim, sans être exposés, au printemps, à une maladie occasionnée par le relâchement.

Plus le mois d’avril est pluvieux, plus la maladie rouge est considérable en Sologne : (c’est une observation que nous n’avons point faite dans le bas-Languedoc.) Les ravages qu’elle exerce sont d’autant plus grands, que les pâturages sont plus humides.

Plutôt on donne les béliers aux brebis, ou ce qui est la même chose, plutôt on fait naître les agneaux, plus la maladie rouge en enlève. Dans ce cas, la saison n’étant pas encore assez avancée, les brebis ne trouvent pas d’herbes aux champs, & ne peuvent fournir assez de lait à leurs agneaux pour leur subsistance.

Cette maladie dépendant donc, comme on vient de le voir, des soins qu’on a des bêtes à laine, sur-tout