Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/343

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sept ou huit jours, on veut les accoutumer au grand air, il faut les mettre sous une cage à petites clairières, afin qu’ils puissent, lorsqu’ils veulent courir, entrer, sortir à leur fantaisie, sans cependant que la mère sorte ; par ce moyen ils ne s’écartent pas trop de la cage, craignant de trop s’éloigner de la poule. Cependant on ne les mettra sous le hangar que quand le jour est bien chaud & qu’il fait un beau soleil ; le duvet de ces animaux n’étant point capable de les garantir de la moindre froidure.

» Il faut dans ce commencement être exact à leur renouveler la nourriture, & à leur en donner en petite quantité chaque fois ; le millet crud est celle qui leur convient le plus après l’orge, & le froment qu’il faut faire bouillir ; les miettes de pain trempées dans du vin leur donnent du courage & de la force : si on voit qu’ils ne mangent point de bon appétit, on peut avoir recours aux miettes de pain trempées dans du lait ou dans le caillé. Il est des ménagères qui leur donnent quelquefois des jaunes d’œufs durcis, qu’elles émiettent très-fin. Cette méthode est excellente lorsqu’on s’aperçoit que la fiente de ces animaux est trop liquide, mais dans tout autre cas elle est nuisible, parce que cette nourriture les constipe au point qu’ils meurent subitement. Les porreaux bien hachés menus, dit Olivier de Serres, leur servent de médecin, pourvu qu’on ait l’attention de leur en donner de temps en temps, & en petite quantité. Il faut sur-tout faire en sorte qu’ils ne manquent jamais de nourriture à mesure qu’ils avancent en âge. Pendant le temps qu’ils sont encore sous la tutelle de la gouvernante, le millet est la principale, en supposant toutefois que l’on est dans un pays où l’on cultive beaucoup de ce grain. On doit bien s’imaginer que nous ne prescrivons point ce régime dans les pays septentrionaux, où la dépense qu’occasionneroit l’usage de ce grain, excéderoit de plus des deux tiers le produit des animaux ; il faut donc dans de tels pays substituer au millet le bled-sarrasin ; & afin qu’un tel régime ne leur porte point de préjudice, il faut de temps en temps leur donner de l’orge bouillie, ou des criblures de froment qui, doivent être aussi bouillies, ou enfin des miettes de pain, telles qu’elles tombent de la table. »[1]

  1. Comme je suis parfaitement convaincu que la manière la plus économique & la plus avantageuse de donner le grain aux animaux est après qu’il a subi la panification, j’ai comparé les progrès de deux couvées de poussins : la première a été nourrie avec des grains simplement cuits à l’eau, la seconde avec ces mêmes grains réduits en farine, qui avoient éprouvé la fermentation panaire & sa cuisson, c’est-à-dire qui avoient été réduits en pain après en avoir séparé le gros son. L’expérience m’a prouvé que la seconde famille a moins consommé de grains, & que les poussins ont beaucoup plus, & plus promptement prospéré que ceux de la première. La panification développe bien mieux a substance nutritive & la rend moins lourde à l’estomac. Les grains simplement cuits à l’eau ressemblent à la bouillie de farine dont on a la mauvaise coutume d’encoller l’estomac des enfans. Une troisième famille a été nourrie avec ce même pain détrempé dans du bouillon & mélangé avec un peu de viande bouillie & hachée très-menu ;