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l’herbe, comme fourrage, n’est pas si parfaite & que l’on fatigue la plante en pure perte.

Le seul désavantage, si c’en est un réel, c’est que l’herbe coupée à cette époque se dessèche plus difficilement étendue sur le sol, que celle qui a été fauchée lors de sa maturité, parce qu’elle a moins laissé évaporer son eau de végétation. La différence entre leur dessication est d’un jour ou deux, suivant la saison, & de trois au plus ; mais ce léger inconvénient est si bien racheté par les bonnes qualités du fourrage, qu’il ne mérite pas d’être compté.


Section II.

Comment faut-il couper le soin, le dessécher & le conserver ?

Il est inutile de répéter ce qui a déjà été dit sur ce sujet. Les second, troisième & quatrième chapitre de l’article Foin (consultez ce mot) renferment tout ce qu’il est important de connoître & de pratiquer.


CHAPITRE VI.

Des prés marécageux, & de la destruction des prairies épuisées.

I. Les prés deviennent marécageux, 1°. parce que les eaux d’irrigation n’ont pas une sortie convenable. Cela arrive souvent dans les prairies qui longent les rivières, les ruisseaux. Ceux-ci, dans leur crue, poussent contre leurs bords des bois, des pailles, &c. qui sont couverts par le limon charrié & déposé par les eaux ; si le dépôt n’est pas trop épais, l’herbe recouverte perce à travers, & sert dans une nouvelle crue à accroître le dépôt ; s’il est un peu considérable, il est bientôt chargé d’herbes provenues des semences portées par les vents ou déposées par l’eau ; c’est ainsi que sont formées successivement les élévations qui bordent les torrens, les ruisseaux, &c ; leur accroissement est insensible, & le propriétaire & le fermier n’y font aucune attention ; peu à peu l’eau surabondante des irrigations ne s’échappe plus en courant, mais seulement par infiltration. Cette espèce de stagnation est très-favorable au progrès des mousses, des joncs & des autres plantes aquatiques. Si on ajoute à ce défaut celui qui provient du piétinement du bétail pendant l’hiver, on ne sera plus étonné d’un tel changement. Faire de larges ventouses sur de tels bords, les multiplier, ou ce qui vaut encore mieux, les raser, est le seul expédient qui remédie au mal. Si les bords de la prairie du côté du ruisseau sont plantés en arbres, leur élévation successive sera plus rapide, plus prompte par la quantité d’ordures que chaque inondation accumule à leur base, & qui sont bientôt recouvertes par l’herbe ; de manière qu’une très-bonne prairie à tous égards, devient marécageuse dans toute la largeur & hauteur qui correspond au niveau du sommet de cette espèce de bâtardeau. Si les arbres sont nécessaires pour contenir par leurs racines les eaux du torrent, & pour les empêcher d’enlever les terres, on doit être très-attentif à établir des ventouses,