Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/628

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végétation ; c’est contre nature & la raison en est simple ; le sol trop dur ne leur permet pas de pivoter ; mais comme la végétation doit s’accomplir, la racine produit au dehors la partie qui auroit été bien mieux nourrie & plus longue si elle avoit été au dedans.

Peur tirer le parti le plus avantageux que présente la culture des raves & des navets, comme engrais ; je demande, 1°. qu’aussitôt que les blés sont semés, on mette la charrue dans les terres destinées à la jachère l’année suivante ; 2°. qu’on leur donne un fort labour croisé, & encore mieux, que la charrue passe deux fois dans le même sillon, afin de soulever plus de terre & lui donner plus de profondeur. Cette terre fortement soulevée éprouve toute l’action des pluies, des neiges, des gelées de l’hiver ; plus il y a de neige, plus les gelées sont fortes & mieux les molécules de la terre sont atténuées, divisées & séparées ; car la gelée est le meilleur de tous les laboureurs. Une observation que chacun peut faire, confirme cette assertion. Toutes les fois que les froids ont été longs & rigoureux, on peut parier que la récolte en grains sera très-belle, à moins qu’au printemps les pluies, la coulaison des fleurs, ou telle autre circonstance ne s’y opposent. Jusqu’à l’époque du froid le blé n’a pas eu le temps de pousser beaucoup de racines, souvent il n’a que sa première racine pivotante ; c’est à la fin de l’hiver lorsque le temps commence à devenir doux, que les racines partent en abondance du collet & qu’elles commencent à former une touffe assez forte & proportionnée aux besoins que la plante en aura par la suite ; mais comme après les gelées ces racines trouvent une terre bien soulevée auparavant par la glace, bien divisée, bien atténuée, elles se hâtent de s’enfoncer, de travailler à la nourriture de la plante, & sa végétation est superbe peu de jours après. D’après cet exemple, il est naturel de conclure que la gelée produira un très-grand effet sur les terres soulevées par les labours donnés avant l’hiver, & plus la gelée aura été forte, plus grande sera la division des grains de terre. La preuve en est encore dans les mottes de terre qui existoient avant l’hiver & qu’on ne retrouve plus dans un champ ainsi labouré. L’eau glacée occupe plus d’espace que dans son état naturel, ainsi l’eau disséminée entre les molécules de la terre, se glaçant, produit le même effet, les sépare les unes des autres, & dès que le dégel survient, ces molécules n’ont plus d’adhésion entre elles ; donc, plus le labour aura été profond, plus il y aura eu de terre soulevée, & plus il y aura eu de division dans les molécules de la terre. On doit encore observer que la partie inférieure & vide entre les sillons, éprouve également l’effet de la gelée, & participe à cette espèce de labourage. À quelle espèce de grains que ce soit, le labourage avant l’hiver est toujours très-avantageux. J’ai insisté sur cette pratique, parce qu’elle influe d’une manière très-avantageuse sur la production des raves & des navets considérés comme engrais. Elle seroit encore très-utile, quand même le champ seroit destiné à rester en jachère. Revenons à la continuation du travail… 3°. Aussitôt après