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& feuilles & produiront le même effet.


II. De l’époque de la plantation Renoncules.

Quelques fleuristes amateurs, & tous les jardiniers n’oublient jamais d’attendre la nouvelle lune pour les plantations de leurs renoncules : s’agit-il d’avoir des fleurs bien doubles, c’est la pleine lune qu’on doit choisir ; je leur répéterai l’adage d’Olivier de Serres,


Que l’homme étant par trop lunier,
De fruits ne remplit son panier.


Ce vieux proverbe est juste dans tous les points ; nous avons assez fait connoître la puérilité des observations des quartiers de la lune, pour ne pas insister plus au long sur cet objet. (Consultez le mot Géroflée) Il n’en est pas de même pour le climat. Le père d’Ardenne, qui habitoit Avignon, trouvoit très-extraordinaire que des écrivains indiquassent les mois de février ou de mars pour l’époque des plantations, tandis qu’il assigne les mois de septembre ou d’octobre ; c’est en général le défaut des écrivains de s’imaginer que ce qu’ils pratiquent dans un canton doit avoir lieu pour tous les autres. Afin de prévenir contre de telles erreurs, je dis que dans tous les climats du royaume, vraiment méridionaux comme ceux de Nice, Toulon, Marseille, Montpellier, Narbonne, &c. ; on doit planter en octobre, afin d’avoir des fleurs à la fin de février ou de mars, parce que l’hiver y étant pour l’ordinaire très-tempéré & souvent nul, les griffes ne souffrent point pendant cette saison. La renoncule craint la grande chaleur ; elle hâte sa végétation, & lorsqu’elle l’éprouve à un degré un peu fort, la plante file, la griffe s’amaigrit, & la fleur est rachitique. S’il survient quelques gelées, on en est quitte pour couvrir les carreaux avec de la paille ou avec des paillassons faits exprès, ou enfin avec des planches ; elles ne craignent pas les petites gelées dès que les feuilles sont hors de terre ; mais si le froid saisit les griffes lorsqu’elles sont en lait, c’est-à-dire, quand commence la germination, elles souffrent beaucoup. S’il survient de la neige & qu’on n’en garantisse pas les feuilles, & les boutons s’ils paroissent, elle leur nuit de même & infiniment plus que les petites gelées. Si l’intensité du froid augmente, il faut alors doubler les couvertures & multiplier les soins. Pendant ma première année d’habitation près de Beziers, j’attendis la fin de février pour planter mes renoncules ; au moment de leur fleuraison, elles furent dévorées par la chaleur & par le soleil, malgré les arrosemens que je leur prodiguai ; cette leçon m’apprit mes dépens à consulter l’influence du climat.

Dans celui de Lyon, par exemple, on peut planter au milieu ou à la fin de février, si l’on espère n’avoir plus de grands froids. Les renoncules plantées en mars ou avril, fleurissent presqu’auisitôt que les premières ; mais l’expérience a prouvé que plus la plante demeure en terre (toute circonstance égale), avant de donner sa fleur, & plus sa fleur est belle. Il en est de ces plantations tardives, comme des semences de blé marsais, qui sont presqu’aussitôt mûrs que les blés hivernaux ; mais c’est aux dépens