Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/390

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

premier, du second ou du troisième ordre ?

R. Les branches du premier ordre sont les deux membres ou mères branches qui, placées à l’angle de quarante-cinq degrés, représentent un V bien ouvert. Ces membres ont poussé des bourgeons qui sont devenus par la suite des branches du second ordre. Ces branches ont poussé de nouveaux bourgeons qui ont formé des branches à fruit, sur-tout dans le poirier ; car les bourgeons du pêcher sont à fruit après la première année, au moins pour la majeure partie.

D. Qu’arrive-t-il lorsqu’un côté de l’arbre l’emporte sur l’autre ?

R. 1°. Les racines se multiplient beaucoup plus du côté trop vigoureux, & leur force & leur nombre vont toujours en augmentant, & celles de l’autre côté en s’appauvrissant & en se diminuant. 2°. La foiblesse ou la force des branches des deux côtés de l’arbre, suit la même marche ; d’où il résulte qu’un de ses côtés prospère & l’autre languit & périt peu à peu ; c’est le fort qui mange le foible.

D. Comment vous y prenez-vous pour qu’un côté ne prévale pas sur l’autre ?

R. En mettant en pratique les principes déja établis & des effets résultans de l’angle de quarante-cinq degrés. Je sais que si je fixe une branche ou bourgeon au-dessus de cet angle, par exemple, à celui de vingt-cinq, il tire beaucoup plus de sève que si je le palissais à l’angle de quarante-cinq, & infiniment plus que si je le palissais très-au-dessous de cet angle ; par exemple à celui de soixante cinq… Ainsi, suivant le besoin, je soulève la branche ou le bourgeon foible, à l’angle de dix, vingt ou trente degrés, & j’incline la trop forte au dessous de l’angle de quarante-cinq degrés ; c’est-à-dire à cinquante, à soixante & même à soixante-dix, si le besoin l’exige. Dans le premier cas, il est ramené à sa direction de jeunesse, & dans le second, au point que l’âge lui auroit fait contracter si l’arbre avoit été livré à lui-même. Par le moyen de l’inclinaison, je modère le cours de la sève du côté le plus fort, & j’empêche que les bourgeons ne viennent ; de tirans & de gourmands qu’ils étoient, je les métamorphose en bois à fruit pour la seconde année. En relevant la branche, le bourgeon sur le côté foible, je le fortifie, j’y attire une plus grande quantité de sève, elle y circule plus librement, & dans peu le changement est sensible, soit de ce côté, soit de l’autre ; d’où il résulte que tous les deux se mettent en équilibre, soit pour la grosseur du bois, le nombre, la force des racines, des bourgeons, &c. ; enfin je suis maître de l’arbre.

D. Puisque vous parvenez à volonté, à donner plus de force au côté foible, il doit donc à la longue ruiner le côté fort, comme celui-ci épuisoit auparavant le côté foible ?

R. L’épuisement de ce côté seroit infaillible, si je conservois la même direction dans les deux ailes de l’arbre ; mais dès que j’aperçois que l’équilibre est rétabli, je relève les branches & les bourgeons que j’avois inclinés au-dessous de l’angle de quarante-cinq degrés, & je les ramène & les palisse tous à cet angle. Sur le côté opposé, je rabaisse le tout & palisse le tout au même angle de quarante-cinq degrés. Alors toutes les branches & bourgeons sont fixés &