Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/431

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quent, cet infiniment petit doit être réputé zéro, & en agriculture il ne mérite aucune considération. Ainsi, toute terre qui n’est pas soluble dans l’eau pure, est une simple terre matrice qui ne concourt à la végétation que parce qu’elle sert de point d’appui aux racines, & parce qu’elle récèle entre ses molécules insolubles, les molécules solubles de l’humus, dont les racines se nourrissent.

Aux articles amendement, engrais ; on a prouvé que, suivant les circonstances, les uns agissoient mécaniquement, & les autres par leurs principes constitutifs. À l’article sève, on a démontré que les principes qui la constituent, devoient tous avoir éprouvé une dissolution, & que l’eau a été le menstrue dans lequel elle a été faite. Consultez ces mots, afin d’éviter ici des répétitions inutiles.

La terre calcaire est donc la seule terre végétale, le véritable humus soluble dans l’eau, & la seule qui établisse & constitue la charpente des plantes. Les falun de Tourraine, les craies de Champagne, sont des chaux, des terres calcaires naturelles, mais elles ne sont pas pures. Lors de leur dépôt par les eaux, elles ont été mélangées plus ou moins avec d’autres substances. Le mélange de substances étrangères est plus abondant dans les autres terres calcaires. Mais si l’on amoncelle des plantes, des animaux morts, & si on les laisse fermenter ensemble, se putréfier, se décomposer, &c. on obtiendra, en dernière analyse, la terre calcaire pure, le véritable humus, enfin, cette terre soluble dans l’eau, & la seule susceptible de s’unir aux matériaux qui composent la sève. Telle est la grande vérité qu’il importe d’inculquer dans la mémoire de tout cultivateur ; puisque en partant de ce principe fondamental, il dirigera tous ses mélanges de terre, tous ses fumiers ; il multipliera des végétaux, afin de les enfouir dans la terre, & sur-tout afin de lui rendre plus de principes qu’ils n’en auront absorbés. Consultez le mot amendement. Il conclura qu’il est absurde d’employer les fumiers sortans de l’écurie, & qu’il faut attendre que la fermentation ait recombiné leurs principes ; que par cette nouvelle combinaison, les principes sont rendus plus solubles dans l’eau, & par conséquent plus analogues & d’une plus facile & plus intime union avec la terre & avec les principes qu’elle contient déjà. Cultivateurs, ne longez qu’à créer ce précieux humus, qu’aucune substance animale ou végétale ne dessèche, en pure perte, sur les champs, dans les chemins. Rassemblez toutes les herbes quelconques, accumulez, amoncelez le plus que vous pourrez ; toutes le contiennent tout préparé, & songez que dans la nature il règne une circulation perpétuelle de principes ; que le végétal actuellement sur pied, servira bientôt, par sa décomposition, à la reproduction de son semblable. L’herbe nourrit l’animal, sa substance devient sa substance, constitue sa charpente, & sa terre principe ou calcaire se convertira à son tour en humus pour le végétal. Ainsi, rien n’est perdu dans la nature, & le cultivateur intelligent sait profiter de tout ce qu’elle lui offre. Cet humus est presqu’en dépôt sur tout le globe, parce que par-tout il y a des plantes & des animaux ; mais il est plus ou moins répandu ; c’est son abondance