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espèce. Il en est ainsi des fleurs doubles que l’on ramène à leur premier & naturel état de simplicité, en diminuant par progression la culture recherchée qui les a fait luxurier, & qui a converti les parties sexuelles de la fleur en feuilles de la fleur ou pétales. Malgré ce que je viens de dire, il y a des variétés constantes. Par exemple, dans les fruits que l’on perpétue par la greffe, la pomme calville rouge ne constitue pas une espèce distincte de la calville blanche. Cette dernière est une variété constante de la première. Lorsqu’une variété est établie dans une plante, on la multiplie & on la conserve, si la plante est susceptible de se reproduire ou par bouture ou par drageons ; &c. mais si pour se la procurer de nouveau, on est forcé de recourir aux semis, on n’est pas assuré d’obtenir la même variété que celle qui a donné la graine, & souvent cette graine fournit de nouvelles variétés, soit pour la forme, soit pour les couleurs que l’on n’attendoit pas.


VASE. BOURBE. Dépôt terreux qui se forme au fond des étangs, ou qui est déposé par les rivières, les ruisseaux, ou qui est entraîné par l’eau des pluies dans un lieu déterminé. L’insouciance des habitans de la campagne est étonnante, relativement au parti avantageux qu’ils pourroient retirer des vases, s’ils prenoient soin de les rassembler.

Pourquoi, le long d’un chemin, par exemple, ou le long d’une terre, ouvrir un fossé sur le bord & sur toute son étendue ? craint-on donc que l’eau n’entraîne pas assez de terrain, sur-tout si la pente est un peu rapide ? Ne vaudroit-il pas mieux, par exemple, laisser dans ce fossé, à tous les dix pieds, une retenue un peu moins haute que les bords du fossé, par-dessus laquelle l’eau surabondance s’écouleroit, sans entraîner la vase ou limon, qui se précipiteroit dans le fond. On se prépareroit de cette manière, le résidu ou meilleure terre de tout le voisinage, & que l’on enleveroit deux ou trois fois l’année lorsque le fossé seroit à sec. Pourquoi laisser perdre l’eau qui lave le pavé d’un village, d’une petite ville, & ne pas la rassembler dans une mare ? Si on craint que cette eau n’incommode, qu’on la fasse couler après quelques jours, & dès qu’elle aura déposé la partie terreuse qu’elle contient. De telles vases vaudroient autant que le meilleur fumier, & peuvent sur le champ être transportées dans les terres. Il n’en est pas tout-à-fait ainsi de celles que l’on retire du fond des étangs, des pièces d’eau, soit qu’elles contiennent ou ne contiennent pas des débris de racines ou de plantes. Il convient de les étendre pendant tout un été, & de les laisser exposées au gros soleil, ensuite aux fortes gelées qui les divisent & les émiettent au point qu’on peut facilement ensuite les distribuer sur les terres comme un excellent engrais. Je préfère cette méthode à celle d’en former un gros monceau, parce que sa seule partie extérieure bénéficie de la lumière, de la chaleur & des effets météoriques.

Quoi qu’il en soit, le cultivateur vigilant regardera les vases quelconques comme une grande ressource & un moyen assuré de se procurer, à peu de frais, beaucoup d’engrais. Il dirigera si bien ses eaux sur toutes