Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/397

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mélangé, on enduit de cet apprêt des cordes d’une longueur proportionnée à l’espace que l’on veut tendre, et on en garnit quelqu’en droit recouvert de joncs et d’herbages que l’on connoît pour une retraite fréquentée des canards. Les cordes engluées doivent être tendues roides au moyen de piquets enfoncés dans le marécage jusqu’à ce que leur tête soit à fleur d’eau, et on les soutient élevées, d’espace en espace, par de petites bottes de joncs, ou en les faisant passer sur les herbes qui se rencontrent là naturellement. On peut, de plus, appâter les environs de nourritures recherchées des canards ; mais même, sans cette précaution, si l’endroit tendu est fréquenté par eux, il ne manque pas de s’en trouver quelques uns arrêtés par les ailes et les plumes, et qui finissent par se noyer à force de se débattre. Il n’est pas sans exemple de trouver pris à ce piège d’autres habitans des marais, et particulièrement des poules d’eau.

Aux hameçons. Ce piège se prépare au moyen d’hameçons à double crochet, connus sous le nom d’hameçons à canards, ou à brochets. On les appâte de diverses choses, et notamment de chairs crues, de mou de veau, de vers, de grenouilles, de petits poissons, ainsi que de glands et fèves, et sur-tout de morceaux de pommes presque pourries, dont on a remarqué, dans les pays à pommes, que les canards étoient très-friands. Les cordes auxquelles ces hameçons sont attachés, doivent elles-mêmes tenir à des piquets bien enfoncés sous l’eau, et avoir assez de longueur pour que l’appât nage à la surface. On l’y retient, lorsque cela est nécessaire, en le plaçant sur un petit morceau dé liége qui lui sert de table et de support. Il faut aussi en laisser quelques uns dormir sous l’eau, pour éviter l’uniformité du piège, et multiplier ses chances, et, par la même raison, ne pas disposer ses piquets avec trop de régularité. C’est encore une bonne précaution de répandre, quelques jours d’avance, aux environs de l’endroit où l’on veut placer ces hameçons, des appâts innocens qui familiarisent le canard à manger dans cet endroit, et l’accoutument, par le succès du régal qu’il y aura fait, à s’y livrer avec sécurité à ses appétits gloutons.

Quelques auteurs conseillent d’attacher tous ces hameçons dans la longueur d’une seule corde tendue par ses deux extrémités. Cette méthode, imaginée pour s’épargner la peine de tailler quelques piquets, est mauvaise, en ce qu’un seul canard pris, agite, en se débattant, tous les hameçons, et peut par-là empêcher toute une bande d’approcher du piège et même l’avertir de s’envoler.

Aux collets ou à la glanée. Il faut, pour cette chasse, se précautionner d’une assez grande quantité de collets, ou lacets, une centaine, par exemple ; on les fait de crin retors en cordonnet, et on les proportionne à la force de l’oiseau contre lequel ils sont préparés. Ces collets s’attachent à des piquets qu’on enfonce dans l’eau, à proportion de sa profondeur, et de manière à ce que les collets surnagent pour la plupart ; quelques uns aussi peuvent être enfoncés entre deux eaux. On sent, qu’en général, la longueur des piquets employés pour les diverses chasses aux canards, est arbitraire et proportionnée au plus ou moins de dureté et de ténacité du fond qui doit les recevoir. Ce qui doit guider le chasseur, c’est d’obtenir qu’ils soient assez fermes pour ne pouvoir être arrachés par le gibier, lorsqu’il est pris au lacet ; et, si le fond ne permettoit pas de cacher la tête du piquet sous l’eau, il faudroit la recouvrir d’herbes ou de roseaux dont l’aspect n’inspirât aucune méfiance au canard. Les bords des rivières ou marais, les prés inondés à la suite d’une pluie ou d’un débordement, sont des