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VOYAGE PITTORESQUE

DANS LE BRÉSIL.

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VIE DES EUROPÉENS.


Les révolutions politiques et les événemens qui depuis quelques années se sont succédé au Brésil, et dont Rio Janeiro a été souvent le théâtre, ont eu des résultats fort remarquables ; mais l’un des plus importons, celui peut-être qui frappe le plus l’observateur, c’est l’intérêt toujours croissant que prennent les habitans du pays à toutes les questions dont la solution peut exercer quelque influence sur l’état intérieur ou sur les relations extérieures du Brésil. Cet intérêt se manifeste librement et sans aucune contrainte, et si l’on compare ces nouvelles habitudes avec l’ancienne obéissance passive, avec cette muette soumission à tous les ordres venus de la métropole, sentimens qui était le caractère dominant de toutes les colonies des États de l’Europe, et surtout de celles de l’Amérique méridionale, on ne niera pas que l’esprit d’examen et de discussion ne se soit mis à la place du respect aveugle qu’on professait pour la supériorité de la métropole, et que ce ne soit là un des traits caractéristiques des mœurs de Rio Janeiro. Les habitans de toutes les classes se livrent aux conversations politiques, et dans leurs groupes on voit des ecclésiastiques, des officiers, des négocians, des ouvriers. S’ils ne sont pas toujours très-instruits du sujet dont ils parlent, toujours est-il qu’ils font preuve de zèle, de raison, d’esprit, et qu’ils expriment leur pensée avec beaucoup de facilité. Chez les peuples méridionaux ces discussions en pleine rue rappellent assez bien la vie publique des anciens ; elles forment l’opinion, elles l’expriment. Mais, comme on peut bien le penser, il existe au Brésil, comme en Europe, différentes manières de voir sur ces réunions. Que les puissans du jour soient incommodés parfois du progrès sans cesse plus sensible de l’esprit d’investigation, du besoin qu’éprouvent les citoyens de se communiquer leur pensée sur des événemens et sur des mesures dont les suites bonnes ou mauvaise agissent sur tous les membres de la société, cela est tout simple ; mais du moins ils ne devraient