Page:Ruskin - La Bible d’Amiens.djvu/19

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corps, peut-être aussi pour vous montrer qu’à la façon des saints à qui vont ses préférences, il n’est pas contempteur du plaisir « honnête[1] », avant de vous mener à l’église, il vous conduira chez le pâtissier. Vous arrêtant à Amiens dans une pensée d’esthétique, vous êtes déjà le bienvenu, car beaucoup ne font pas comme vous : « L’intelligent voyageur anglais, dans ce siècle fortuné, sait que, à mi-chemin entre Boulogne et Paris, il y a une station de chemin de fer importante où son train ralentissant son allure, le roule avec beaucoup plus que le nombre moyen des bruits et des chocs attendus à l’entrée de chaque grande gare française, afin de rappeler par des sursauts le voyageur somnolent ou distrait au sentiment de sa situation. Il se souvient aussi probablement qu’à cette halte au milieu de son voyage, il y a un buffet bien servi où il a le privilège de dix minutes d’arrêt. Il n’est toutefois pas aussi clairement conscient que ces dix minutes d’arrêt lui sont accordées à moins de minutes de marche de la grande place d’une ville qui a été un jour la Venise de la France. En laissant de côté les îles des lagunes, la « Reine des Eaux » de la France était à peu près aussi large que Venise elle-même », etc.

Mais c’est assez parler du voyageur pour qui Amiens n’est qu’une station de choix à vous qui venez pour voir la cathédrale et qui méritez qu’on vous fasse bien

  1. Voir l’admirable portrait de saint Martin au livre I de la Bible d’Amiens : « Il accepte volontiers la coupe de l’amitié, il est le patron d’une honnête boisson. La farce de votre oie de la Saint-Martin est odorante à ses narines et sacrés pour lui sont les derniers rayons de l’été qui s’en va. »