Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/220

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principes d’architecture des anciennes Écoles. Ce raffinement, cette perfection avaient aussi leurs périls, et l’histoire future de l’Italie descendant de l’abus du plaisir à la corruption, eût probablement été la même, qu’elle eût ou non appris à écrire purement en latin ; mais l’effet qui aurait suivi ce haut effort d’énergie n’eût pas été semblable à celui que produisit la connaissance des œuvres classiques. Pour aujourd’hui, je me borne à signaler cette différence.


Le résultat de ce soudain enthousiasme pour la littérature classique qui augmenta pendant toute la durée du XVe siècle, fut, en ce qui concerne l’architecture, l’abandon complet de la science gothique. L’arceau pointu, la voûte sombre, les colonnes groupées, la flèche s’élevant vers le ciel, tout fut rejeté et aucune construction ne fut plus admise sans l’architrave passant de pilier en pilier, sur l’arceau rond ; sans les colonnes rondes ou carrées et le toit à pignon ou à fronton. Deux nobles éléments qui, par bonheur, existaient à Rome, furent autorisés pour cette raison : la coupole, au dehors ; la voûte, à l’intérieur.


Tous ces changements de formes furent malheureux, et il est presque impossible de rendre justice à l’ornementation souvent exquise du XVe siècle placée sur le froid et maigre style romain. Il existe, à ma connaissance, un seul monument en Europe, — le Dôme de Florence, — sur lequel les ornements, bien que remontant à une École beaucoup plus ancienne, sont d’une si merveilleuse finesse qu’ils nous font penser à ce qu’aurait pu être l’œuvre des parfaits ouvriers de la Renaissance entre les mains d’hommes tels que Verocchio et Ghiberti, s’ils l’eussent déployée sur la magnificence des constructions gothiques.