Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/355

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tombe révélatrice d’une destinée semblable, la mélancolique pensée de la bergère du Poussin à peine exprimée : Et in Arcadia ego....

Et au delà ?... Ne nous occupons pas de l’au-delà ! Occupons-nous de ce que nous avons à faire dans cette vie. Nier l’autre est puéril,... que pouvons-nous nier ? Mais discuter et raisonner sur l’autre vie est ambitieux.... Que pouvons-nous affirmer ? Contentons-nous d’admirer ce que nous voyons et de l’aimer. N’attendons pas d’extraordinaire récompense ; si nous sacrifions le temps, que ce ne soit pas pour gagner l’éternité ; le monde, que ce ne soit pas pour gagner les cieux. N’attendons d’autre récompense du ciel que sa splendeur ; de la terre que son repos. Ayons de l’héroïsme la même notion que le jeune Grec antique, s’il faut absolument en avoir une, — donner sa vie pour un baiser — et ne pas l’obtenir.... Cependant n’interrompons point les visionnaires lorsqu’ils nous parlent d’un pays merveilleux où les brises de l’Océan courent autour des îles bénies, où les fleurs brûlent de joie à jamais. Écoutons les prophètes comme on écoute chanter les oiseaux. Ils ajoutent à la Beauté. Ne cherchons aucun trône dans les cieux que les rochers, aucun esprit dans les cieux que les nuages. Dans les fleurs de ces rochers et dans les broderies de ces nuages passionnément aimés reconnaissons le mystère d’un