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LES ORDRES DE PARIS.

Est plus grant que ne fu ersoir[1].

Li Rois a filles à plantei[2],
Et s’en at si grant parentei
Qu’il n’est n’uns qui l’osast atendre[3].
France n’est pas en orfentei ;
Se Diex me doint boenne santei,
Jà ne li covient terre rendre
Pour paour de l’autre deffendre :
Car li Rois des filles engendre,
Et ces filles refont auteil.
Ordres le truevent Alixandre,
Si qu’après ce qu’il sera cendre
Serat de lui .c. ans chantei.

La Trinitei pas ne despris[4] :

  1. Ersoir, hier soir. — Le Ms. 7633 saute ce vers, et donne pour celui qui vient après la leçon suivante :
    Est hui plus gratis qu’il n’ière arseir.
  2. Outre les Filles-Dieu de Paris, saint Louis fit encore de grands biens à celles de Rouen, d’Orléans, de Beauvais, etc. : c’est probablement ce qui fait dire à Rutebeuf que ce prince a des filles à plantei, c’est-à-dire : en quantité, à profusion.
  3. Ms. 7615, Var. Que nus ne l’oseroit atendre.
  4. Cette strophe ne se trouve pas au Ms. 7615. — L’ordre de la Trinité fut fondé en 1198, sous Innocent III, par Jean de Matha et Félix de Valois, que Philippe-Auguste protégea tous deux. Cet ordre fut établi afin de travailler à la rédemption des captifs. Deux ans après leur fondation, en 1200, les Trinitaires, dans une seule année, en tirèrent d’esclavage cent quatre-vingt-six. Comme ils avaient à Paris un couvent dont la chapelle était consacrée à saint Mathurin, on leur donna le nom de ce saint, et comme d’après leur première régle, qui était fort sévère, il leur était interdit de se servir de chevaux pour leurs quêtes et leurs voyages, le peuple les appela Mathurini asinorum. Un registre de la chambre des comptes, de 1330, nomme ceux qui habitaient à Fontainebleau les Frères des ânes de Fontainebliaut, et Rutebeuf dit, dans La chanson des Ordres (voyez la strophe 7e) : D’asnes