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ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

Et mosterra apertement
Le vermeil sanc, le glorieux,
Le seintisme, le précieux
Qui de son seint flanc degouta
Quant Longis la lance i bouta[1] ?
Quant te dira ce poissant sire :
« Voiz ci la honte et le martire,
Voiz ci les costés et le flanc,
Voiz ci les plaies et le sanc
Que je pour t’amor respandi ! »
Que diras-tu ? car le me di,
Chétive, adonques que diras ?
Chétive, adonques où iras ?
Las ! las ! que porras dire
Quant courrouciez ert nostre Sire
Et airriez si durement
Que trambleront communément
Angre et archange touz ensemble
Si comme fet la feuille el tramble ?
Chétive, adonques que feras[2] ?
Chétive, adonques où muceras ?
Comment auras adonc pooir
Regarder l’oses et véoir ?
Que diras-tu, chétive, adoncques
Quant trestuit cil qui furent onques,
Bon et mauvès communément,
Verront trestot apertement
Tes renoianz renoieries
Et tes pullantes pullanties ?
Que diras-tu quant Jhésu-Crist
As renoié pour Antécrist ?
Que diras-tu, chétive d’âme,
Quant tu verras la douce Dame
Qui nommée est virge Marie,
Q’as renoiée et déguerpie ?
Di-moi, di-moi, di, forvoiée,
Di-moi, caitive fauloiée[3],
Di-moi, di-moi, di, di, mesele,

  1. Ces six derniers vers offrent un assez frappant rapport avec le commencement de la Complainte d’outre-mer.
  2. Ce vers n’est pas au Ms. du fonds de Saint-Germain.
  3. Ce vers n’est pas dans le Ms. 1672.