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ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

Et lor conseil et lor aïe.
Douce Dame sainte Marie,
Encor frémis touz de péur ;
Jamès nul jor n’ière asséur
Devant que je r’oie l’escrit
Qui ma mort tesmoigne et descrit[1].
Las ! c’est là riens qui plus m’acore ;
Las ! li déable l’ont encore ;
Las ! cil escrit est en enfer ;
Mès il n’i a porte de fer,
Tant soit de fer très bien fremée,
Que tost ne l’aies deffremée.
Douce Dame, quan toi serra,
Jà de si loinz ne te verra
Li déables qu’il ne s’enfuie.
Douce Dame, si ne t’anuie ;
Je te requier, je te dépri
Que tant faces par ta merci
Que r’avoir puise cele chartre.
Jà li déable en si fort chartre
N’en si fort leu ne l’auroit mise
Que ne l’aies à ta devise
Toutes les foiz qu’il te serra,
Bien sai que jà Dieux ne verra
Même devant que je la r’aie. »
— « Jà de tout ce rien ne t’esmaie.
Fet Nostre-Dame, biaus amis.
Quant ton afère as sor moi mis,
Jà n’i aurai tant de meschief
Que je n’en viengne bien à chief. »

La mère Dieu à tant s’em part,
Et Théophillus d’autre part
Iij. jors en temple demora,
Ainz jor ne nuit ne s’en torna.
La tierce nuit tant ot veillié,
Tant jeusné et tant traveillié,
Et tant ploré et tant gémi
Que devant l’autel s’endormi.
La mère Dieu, la débonère,
A tout l’escrit à lui repère

  1. Ce vers n’est pas au Ms. 1672.