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ADDITIONS.

Me couchai, c’est vérité fine,
Près du saut Wautier, en la prée,
Qui est merveilleuse et faée[1].
Penssis estoie en mon corage
Du bon siècle cortois et sage
Qu’Avarisce a tout depécié.
Si est domages et péchié
Que Larguece est si estrangie
Et Avarisce est essaucie.
Le végile de cele feste,
Mon sorcot ploié soz ma teste,
M’en dormi en cele penssée
En la place que j’ai nommée.
Près de moi en dormant oï
Quant le sommeil m’ot acoï
Ij. choses qui mult haut pledièrent ;
A mains d’un andain de moi ièrent.
L’une parloit mult simplement
Et li autre orguilleusement.
Je m’esvillai, ce m’est avis ;
Les .ij. choses vi vis-à-vis :
L’une fu grande et bien taillie,
D’un blanc samit appareillie ;
Cote en ot, sorcot et mantel
Afublé .i. poi en chantel ;
La face ot doucement formée,
Qui fu si à point colorée
Com nature le pot miex fère.
Bouche ot vermeille, et por miex plère
Ot vairs iex, rians et fenduz,
Les braz bien fez et estenduz,
Blanches mains, longues et ouvertes.
Aus templières que vi apertes
Apparut qu’ele ot teste blonde,

  1. Faé, enchanté. — On trouve dans un roman du 13e siècle intitulé Le petit Tristan :
    Il est des lieus faés ès marches de Bretagne.