Page:Ryner - L’Homme-fourmi, Figuière.djvu/24

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— Quoi ! s’écria « la reine folle », tu ne demandes rien pour ton âme… Je protestai :

— Mais j’ai tout demandé pour mon âme. La fortune me permettrait de me donner sans réserves à ma chère économie politique. Je vivrais à Paris, au milieu d’une société intelligente. J’assisterais aux premières…

Elle m’interrompit, méprisante :

— Ah ! c’est ça que tu appelles des joies de l’âme. Pauvre homme ! qui n’est même pas curieux…

— Par exemple ! pas curieux, moi… Eh ! bien, et mes travaux de statistique ?…

Elle ne daigna pas répondre. Elle s’assit sur l’herbe, me fit signe de l’imiter. Délicatement, ses doigts cueillirent une fourmi. Elle la considéra, avec un sourire étrange. Puis elle demanda :

— Tu n’as jamais désiré savoir ce qui se passe dans l’esprit d’un autre animal ? Mon orgueil d’homme s’exprima :

— Il doit s’y passer si peu de chose !

— C’est ce qui te trompe, affirma-t-elle. Veux-tu faire l’expérience ? Veux-tu que je te change en fourmi ?…