Page:Ryner - Le Massacre des amazones, Chamuel.djvu/95

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un prix à l’Académie. Parce que j’aime tous les sentiments vrais, je soufflète avec joie les masques de noblesse. Mon admiration attendrie pour saint Vincent de Paul augmente mon désir de cracher au visage de Tartuffe. Polyeucte m’émeut trop profondément pour que je ne m’irrite point quand tel joli monsieur qui chercha la fortune dans le mariage prend la Samaritaine pour matière à mettre en vers français ou quand Armand Silvestre, avec des doigts qu’il vient de promener sur de grosses fesses toulousaines et qu’il a peut-être oublié de laver, manie les accessoires de la Passion et fait la quête au nom de Jésus.

La femme est naturellement l’amante de la paix. Lorsqu’elle chante la guerre, son accent est faux, ou sa bravoure apparente est une fleur ignoble nourrie du fumier de bas sentiments : dépit enfantin d’une vieille partie perdue et besoin animal de vengeance ou, comme ils disent, de revanche ; tout au moins cette admiration lâche de la force brutale et de ses symboles qui émeut la gigolette sous les menaces de son « petit homme », la cuisinière devant le pantalon rouge et la bourgeoise devant l’épaulette.

Pour ces diverses raisons, la plupart des cantinières de lettres que j’ai rencontrées m’ont paru méprisables : et celles qui m’offraient leur vin frelaté en chantant dans la langue de Déroulède qu’elles prennent pour la