Page:Ryner - Les Chrétiens et les Philosophes, 1906.djvu/133

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approché de la sagesse. Quand on parle des dieux, on ne parle pas des hommes. Voilà tout ce que tu dis, mon cher Historicus.


historicus

Je dis cela et je dis autre chose. Parler de ce qui n’existe pas en avouant qu’on parle de rien, c’est inutile. Mais, si tu négliges d’avouer, tu commets un mensonge. Seul le réel peut intéresser un homme de sens…


épictète

Tu disais tout à l’heure que certaines conceptions de l’esprit t’intéressaient parce qu’elles avaient les faits pour langage. Comment la pensée qui a eu pour langage la vie entière d’un Socrate, d’un Antisthène, d’un Diogène, d’un Zénon, d’un Cléanthe, d’une Arria, d’un Thraséas, serait-elle indifférente à un esprit curieux comme le tien ? Mais, pour l’homme soucieux de se perfectionner, elle est la seule intéressante. S’il existait une conception qui pût embellir les formes du corps, ah ! comme elle exciterait l’amour de Serenus et de Serena. Il existe une conception qui peut embellir notre âme et nous rendre presque semblables aux dieux : elle seule est digne de l’amour des hommes. D’ailleurs tu te trompes, Historicus, si tu crois que la réalité remplit toute la catégorie de la vérité et de l’existence Le parfait existe à un plus haut degré que le réel. Même le réel n’existe peut-être que par sa participation plus ou moins grande au parfait. Porcus est plus réel que Junius Rusticus pour la grossièreté sans pensée d’une balance. Mais, pour, l’esprit qui juge, Junius Rusticus existe mille fois plus que Porcus.


historicus

Tu rêves comme quelqu’un qui vient de lire Platon Mais tu sais ce qu’Aristote a répondu à Platon.