Page:Ryner - Petit manuel individualiste, 1905.djvu/9

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Pourquoi les religions peuvent-elles montrer plus d'indulgence que les doctrines morales ?

Les dieux des religions sont des monarques puissants. Ils sauvent les fidèles par des grâces et des miracles. Ils accordent le salut en échange de la loi, de certaines paroles rituelles et de certains gestes convenus. Ils peuvent même me tenir compte de gestes que je fais faire et de paroles que je fais prononcer par des mercenaires.

Que dois-je faire pour mériter réellement le nom d'individualiste ?

Je dois mettre tous mes actes d'accord avec ma pensée.

Cet accord n'est-il pas pénible à obtenir ?

Il est moins pénible qu'il ne le paraît.

Pourquoi ?

L'individualiste qui commence est retenu par les faux biens et les mauvaises habitudes. Il ne se libère pas sans quelque déchirement. Mais le désaccord entre ses actes et sa pensée lui est plus pénible que tous les renoncements. Il en souffre comme le musicien souffre d'un manque d'harmonie. Le musicien ne voudrait, à aucun prix, passer sa vie an milieu de bruits discordants. De même mon inharmonie est pour moi la plus grande des douleurs.

Comment s'appelle l'effort pour mettre sa vie d'accord avec sa pensée ?

Il s'appelle la vertu.

La vertu obtient-elle une récompense ?

La vertu est sa récompense à elle-même.

Que signifient ces paroles ?

Elles signifient deux choses :
1° Si je songe à une récompense, je ne suis pas vertueux. La vertu a pour premier caractère le désintéressement.
2° La vertu désintéressée crée le bonheur.

Qu'est-ce que le bonheur ?

Le bonheur est l'état de l'âme qui se sent parfaitement libre de toutes les servitudes étrangères et en parfait accord avec elle-même.