Page:Ryner - Prostitués, 1904.djvu/291

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impraticable et, lentement, douloureusement, on s’écarte de cette paralysie.

On reste attaché — on le croit du moins — à sa doctrine morale. On répète encore des sentences individualistes et des formules stoïciennes. Mais ces lèvres ne sont point faites pour les paroles d’orgueil et au passage elles les attendrissent comme des aveux d’amour. L’âme de Camille Mauclair est une âme féminine. Elle a besoin d’appui. Son éthique, quand elle sera dégagée d’une influence contraire à sa nature, sera faite uniquement de tendresse, uniquement du besoin de donner et de recevoir. Et l’esprit délicieusement ressemble à l’âme. Il a besoin, lui aussi, de recevoir et de donner, de se sentir solidaire et fraternel ou plutôt dévoué et filial. Sa logique subtile et ingénieuse apporterait à une doctrine aimée bien des conséquences intéressantes ; mais comme il serait heureux qu’on lui fournît les principes premiers…

Rien n’est plus curieux que la transition que traverse Mauclair depuis quelques années et je sais peu de spectacles plus beaux que son pèlerinage : parti d’un individualisme dont la noblesse le touche encore mais qui exige décidé-