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LES MUSES FRANÇAISES

Car mourir sans goûter une joie ineffable,
Sans que la vérité réalise la fable
De mes rêves d’amour, de mes vœux superflus ;

Non ! je ne le puis pas ! non, mon cœur s’y refuse ;
Et pourtant ne crois pas, hélas ! que je m’abuse :
Je désire toujours… mais, je n’espère plus !

SONNET

Oui, les illusions dont toujours je me berce
En vain leurrent mon cœur d’un espoir décevant.
Impassible et cruel le monde les disperse.
Ainsi que des brins d’herbe emportés par le vent.

Va moi, me rattachant à ma fortune adverse,
J’étouffe dans mon sein tout penser énervant ;
Malgré mon désespoir et les pleurs que je verse,
Je crois à l’avenir, et je marche en avant !

Pour soutenir ma foi, j’affronte le martyre
Des sarcasmes que jette une amère satyre
A mon rêve d’amour le plus pur, le plus cher !

On peut tailler le roc. on peut mollir le fer,
Fondre le diamant, dissoudre l’or aux flammes.
Mais on ne fait jamais plier les grandes âmes !

LE PRINTEMPS

Quel beau soir ! quel air pur ! quel suave bien-être !
Dans son limpide azur la lune me sourit ;
Lilas et marronniers que le printemps fleurit.
Élèvent leurs rameaux jusques à ma fenêtre.

Dans ce petit jardin de hauts murs circonscrit.
Pour m’offrir son parfum chaque fleur semble naître ;
Chaque oiseau de son chant m’agite et me pénètre.
O nature ! je sens ton souffle et ton esprit !

En toi la sève court, en moi monte la flamme !
Mes bras cherchent des bras ; mon âme appelle une âme !
En face, à ce balcon, qui vient de s’éclairer.